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PHystorique- Les Portes du Temps
17 février 2018

La châsse des reliques de sainte Radégonde

Poitiers châsse des reliques de sainte Radégonde

La châsse des reliques de sainte Radégonde a la forme d’une église du XIIIe siècle, et c’est à ce siècle, si remarquable pour la pureté du style, que l’on a emprunté ce genre des décorations adoptées. Les deux grandes faces ont 50 cent., les petits côtés 25. L’élévation est de 60, en y comprenant le couronnement du toit de l’édifice. Sur le rampant de la première face, deux médaillons quadrilobés, formés d’émaux de diverses couleurs, représentent : 1° saint Médard bénissant sainte Radégonde prosternée à ses pieds ; 2° le miracle des avoines. On voit le bon laboureur qui vient de jeter le grain qu’une intervention miraculeuse a fait germer et grandir au point de cacher la fugitive aux regards du guerrier qui la poursuit.

Sur la face verticale du même côté, la reine est représentée offrant à saint Pient, évêque de Poitiers, le pain que ses mains ont préparé pour le sacrifice, et elle lui dit : Iste panis non est communis cum reliquo.

Dans les petites arcades sont dessinées sainte Agnès et sainte Disciole, les compagnes fidèles de Radégonde.

Sur l’autre côté de la châsse, l’artiste a reproduit, au milieu d’ornements en tous points semblables a ceux que nous venons de décrire, les sujets suivants :

Dans les deux médaillons du rampant : 1° l’apparition de Notre-Seigneur Jésus-Christ a sainte Radégonde dans sa cellule ; 2° la mise au tombeau de la reine par saint Grégoire de Tours.

Dans la grande arcade trilobée, sainte Radégonde à genoux reçoit de saint Euphrone, évêque de Tours, la relique de la vraie croix que l’empereur d’Orient Justin le Jeune lui avait envoyée.

Dans l’une des petites arcades, l’évèque de Poitiers, saint Fortunat, est représenté tenant un phylactère sur lequel on lit le premier vers de l’hymne Vexilla regis, qu’il a composée pour la cérémonie de la réception du bois sacré, alors qu’il n’était encore que simple prêtre.

Dans l’autre des petites arcades, saint Junien tient en ses mains le cilice et la discipline que Radégonde et lui avaient échangés en témoignage de leur sainte amitié.

L’intérieur de la châsse contient une portion insigne du bras et de la tête de la sainte, ce qui est indiqué sur le plat d’un des petits côtés par un bras en haut relief, et de l’autre côté par le buste même de la reine.

Au bas du bras et du buste, une cavité garnie d’un cristal laisse apercevoir les saintes reliques.

Le blason ajoute son langage à ces symboles parlants. Les armoiries d’Alphonse de France, frère de saint Louis, comte de Poitou, et celles de Mgr Louis-Edouard Pie, évêque de Poitiers, rappelleront aux âges futurs la mémoire du prince qui fut un des plus grands bienfaiteurs de l’antique église de Sainte-Radégonde, et le souvenir du prélat auquel fut due la pensée d’offrir aux reliques de la patronne de Poitiers un monument digne d’elles. L’inscription suivante complète cet assemblage magnifique, scintillant de dorures, d’émaux et de riches ciselures :

« Hanc capsam sumptibus cleri et fidelium conditam solemniter benedixit, in « eâque sacra ossa de capite et de brachio beatæ Radegundis, apud « monasterium sanctæ Crucis servari assueta, reclusit Ludovicus Eduardus, « episcopus Pictavensis, anno Domini MDCCCLIV, operis magister et delineator « Johannes Baptista Lassus. Celavit Achilles Legost. »

 

NOTICE SUR LA Suite D'UNE INSCRIPTION DÉCOUVERTE A SAINTE-RADÉGONDE DE POITIERS

NOTICE SUR LA Suite D'UNE INSCRIPTION DÉCOUVERTE A SAINTE-RADÉGONDE DE POITIERS

Par M. l'abbé AUBEB, président de la Société.

Vous vous rappelez sans doute, Messieurs, qu'une inscription retrouvée, dans le cours du mois de mai dernier, sous les boiseries qui masquaient le sanctuaire de Sainte-Radegonde de Poitiers, n'avait pu nous donner qu'en termes incomplets les renseignements historiques gardés précieusement dans une obscurité de plusieurs siècles.

 Le sens, aussi net que possible, quant au fait qui y était constaté, restait cependant comme suspendu à la fin de la dernière ligne après le nom de l'abbesse Béliarde, sous le gouvernement de laquelle on avait recouvré le corps de Ste Radegonde : à ce nom manquait la troisième personne d'un verbe qui devait exprimer la part qu'avait prise à l'événement celle dignitaire du monastère de Sainte-Croix. On se demandait comment un pareil oubli avait été possible, et personne ne se doutait, malgré d'assez

fréquents exemples bien connus, que la fin de la phrase pût être placée non loin de là. C'est pourtant ce qu'a fait découvrir la continuation des travaux. En démolissant un piédestal sur lequel portait une statue adossée à la face occidentale du pilier dont la première inscription occupe la face nord, les ouvriers ont vu apparaitre derrière le malencontreux annexe le complément de notre trouvaille

 La nouvelle page de pierre est gravée très-certainement par la même main, en beaux caractères romans qui prêtent aux mêmes observations que les précédents par leurs dimensions, leur mode d'abréviations, leurs formes spéciales. Ce sont aussi les mêmes mesures pour l'encadrement qui renferme noire pièce. Enfin celle-ci a cinq lignes, comme la précédente; mais, par une singularité que son contenu rend moins étonnante, elle n'est pas en vers. La prose a subitement remplacé la poésie historique: c'est que le récit finit, à peu de chose près, avec le dernier mot de la première page; il n'est presque plus mention ici que d'annotations chronologiques ; el nous savons tous combien l'expression des dates se prête peu aux exigences du mètre latin. Ce n'est pas que de nombreux témoignages de tentatives semblables ne vivent encore sur nos vieux murs ou sur les débris de nos musées ; le premier vers lui-même :

Annis mille Dei carnis bissexque peractis,

en serait un autre exemple. Mais aussi personne n'ignore ce que les distiques y ont gagné d'aisance et d'harmonie.

La prose n'est donc pas un accident regrettable dans l'espèce, el l'antiquaire s'en consolera plus facilement que des mutilations trop multipliées qu'a subies encore le pauvre petit monument. Il est vrai qu'on n'a à regretter que le commencement et la fin de chaque ligne, et quelques autres lacunes de peu d'importance; d'où résulte qu'au fond le sens général n'y perd rien , et les mains barbares des manœuvres qui , là comme sur le côté nord ont enfoncé des barres de fer dont les efforts firent éclater la pierre, n'ont pas poussé l'inintelligence jusqu'à effacer entièrement cette chronique du XIe siècle.

On y lit clairement d'abord ce que les données déjà obtenues avaient laissé deviner, à savoir : que Béliarde, après la découverte du pieux trésor si longtemps du pilier, caché dans le secret de la grotte souterraine, avait pris occasion de cette possession nouvelle pour faire orner convenablement la crypte où reposait la sainte patronne de Poitiers : il parait même qu'elle y avait fait suspendre plusieurs lampes.

On trouve encore que ce recouvrement des reliques dut s'effectuer dans les quinze derniers jours de février de l'an 1012 (1013), ou peut-être le 28, car nous n'avons plus le terme ordinal qui devait précéder le mot kalendarum.

Enfin, il y est mention, comme dans tous les actes de ce temps, des souverains alors régnants et de l'évêque diocésain : c'étaient Robert II, roi de France, qui gouverna de 996 à 1021 ; un Guillaume, comte de Poitou, qui doit être le IIIe du nom, ou le V comme duc d'Aquitaine, dont le gouvernement se prolongea de 990 à 1029, et qui fut surnommé le Grand; l'évêque est Gislebert, qui siégea de 975 à 1021.

– On voit que toutes ces dates concordent parfaitement avec celle de 1012, et qu'il n'y a pas moyen de révoquer en doute l'authenticité de notre charte lapidaire.

Je joins ici un spécimen aussi exact que j'ai pu le faire de celle seconde partie de l'inscription. (V. la planche.)

Maintenant, qu'on me permette une remarque d’où l'on sera libre de tirer telle conclusion que l'on voudra, mais qui me semble fondée sur un rapprochement capable de fixer l'attention. Le mot kalendarum de la première ligne pouvait très-bien se trouver précédé du mot pridiè ; la place laissée vide devant lui parait être celle qui suffisait à contenir ces six lettres.

Or, la veille des calendes de mars était précisément le 28 février, jour où se célèbre la fête de Ste-Radegonde-des-Avennes.

Mais ne serait-il pas remarquable que cette date fût encore celle de la découverte de la sainte? n'aurions-nous pas quelques conjectures à former sur celle coincidence?

Le séjour des reliques au monastère de Dijon est moins que jamais acceptable en présence du témoignage que nous avons examiné dans notre première notice (1).- Quant à celui qu'on leur fit faire à Saint-Benoit de Quinçay, et dont le martyrologe gallican de du Saussay indique la fin au 28 février, nous pouvons, sans trop de hardiesse, le regarder aussi comme donnant lieu à des doutes fondés.

 

En effet, outre qu'on sait parfaitement que à Saussay n'a pas autant d'exactitude et de critique que d'érudition, je cherche vainement à quelle époque le saint corps aurait été soustrait de Poitiers et transféré à Saint-Benoit pour y trouver une sûreté contre les Normands.

 Nous avons vu que ces rudes conquérants, inconnus à notre littéral avant 820, ne s'avancèrent jusqu'à Poitiers pour la première fois qu'en 846. Il est plus que probable que la destruction de l'abbaye, qu'on leur attribue au IXe siècle (2), aura précédé ou suivi de près le sac de notre ville.

Dans le premier cas, on aurait pu choisir le monastère pour asile; dans le second, les reliques de sainte Radegonde n'auraient pas échappé plus que les autres aux conséquences du pillage.

Je me sens bien plus porté à croire que le précieux dépôt que gardaient les filles de Sainte-Croix n'a jamais quitté leur église; qu'il y avait été si parfaitement caché à tous les regards, qu'on l'y aura perdu de vue, personne n'allant plus dans la crypte, dont l'entrée interdite et soigneusement murée était devenue inapercevable. Peut-être même avait-on répandu le bruit d'une translation dont la persuasion devait ôter aux ennemis toute pensée d'un sacrilège.

Et lorsque Béliarde, renseignée en 1012 par quelques souvenirs de l'abbaye, par quelque titre laissé à ce dessein dans les archives , aura vu ses recherches couronnées d'un succès qui dut la rendre si heureuse, on aura regardé ce recouvrement de l'auguste patronne comme un retour de la mère au milieu de ses enfants, de la fondatrice dans le monastère qu'elle semblait avoir privé deux siècles durant de sa présence; de là cette fête de advenis , des étrangers, dont le concours aura dû se porter avec un religieux empressement vers le tombeau retrouvé de la sainte, et à laquelle ce nom sera demeuré en souvenir de cette affluence remarquable.

 Il n'y aurait donc qu'une très-légère différence entre le titre que je donnais ici à cette fête de sainte Radegonde, des Étrangers ou des Pèlerins, placée le 28 février dans le Propre de la collégiale, et celui que lui donna longtemps la légende des Avoines ( de avenis ).

Cette légende, on le sait, n'est appuyée sur aucune des règles d'une saine critique, et quand notre savant collègue, M. de Fleury, l'a interprétée soit par l'arrivée de la sainte (de adventu), ce qui semble un peu forcé, soit par le souvenir d'une hôtellerie destinée aux voyageurs sous son vocable, il ne pouvait pas connaitre le document qui vient de nous être révélé. Pour moi, il me parait que les conséquences que j'en tire naissent assez naturellement, et que des deux faits mentionnés sous la date du 28 février, pourrait bien être seul le dernier de quelque valeur el renfermer sous une vérité incontestable le germe d'une poétique et ingénieuse fiction.

Voici maintenant comment je lirais le texte en lui restituant les mots ou syllabes peu lisibles :

Pridie KALENDARUM MARCII PATEFE-
cit, CRIPTAMQUE LUCERNIS HONESTE F.

.....ULE BELIARDSS TUM SER-
vula sororum, ROBERT REX DUXQUE PICTAVIS WIL-
LELMUS APEX. GISLEBERTO REGENTE ECCLESIAM.

Et je traduirais ainsi :

« Béliarde découvrit ces précieuses reliques la veille des calendes de mars, el fit orner la crypte de lampes qui y brúlent en son honneur. Béliarde était alors l'humble servante de ses sæurs du monastère. Robert était roi de France. Guillaume le Grand était duc d'Aquitaine et comte de Poitou. Gislebert gouvernait l'église de Poitiers. »

 

Les chapelles Sainte Radegonde Plantagenêt et l'ermite Jean Le Reclus<==.... 4.... ==> ANNE d'Autriche mère de Louis XIV et SAINTE RADEGONDE (Time Travel Eglise de Poitiers)

 

 

 

 


 

(1)    Bulletin de la Société des antiquaires de l'Ouest et des musées de ..., Volume 5, p. 361.

(2) Du Tems, Clergé de France , l. I, p. 167.

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