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PHystorique- Les Portes du Temps
28 novembre 2019

L’Abbaye Royale de Beaumont lès Tours - Henriette-Louise-Marie-Françoise-Gabrielle de Bourbon

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Abbaye de moniales bénédictines peut-être fondée vers 580 à Tours par Ingeltrude, tante du roi Gontran, transférée vers 1002 à Beaumont-lès-Tours par Hervé de Buzançais. Fondation approuvée par le roi en 1007. L'abbaye dépendait pour le temporel du chapitre de la collégiale Saint-Martin de Tours; pour le spirituel elle resta toujours fidèle à la règle de Saint-Benoît.

Ingeltrude, fille de Clothaire Ier, donna les premiers commencements, environ l'an 580, à l'abbaye de Beaumont qui s'est depuis élevée jusqu’au comble de grandeur et de piété qui l'ont fait éclater en France ; cette princesse étant veuve, conçut le dessein de consacrer le reste de ses jours à Dieu, dans une sainte retraite ; et animée d'un mouvement si pieu, elle résolut de faire un voyage au tombeau de saint Martin, si célèbre en ce temps par les continuels miracles qui attiraient de tous cotez la dévotion des peuples ; elle ressentit pour lors en ce saint lieu qu'un attrait intérieur de Dieu l'engageait à passer près du tombeau de ce grand saint le reste de sa vie.

C'est pourquoi elle établit sa demeure dans l'espace le plus proche qu'elle peut ménager auprès de cette église, et elle y lit construire une chapelle, qu'elle lit dédier sous le nom de Nostre-Dame-de-l'Ecrignole, c'est-à-dire selon que quelques-uns l'ont interprété, Excellente ou Principale ; elle ajouta un bâtiment près de cette chapelle, où elle assembla plusieurs vierges et veuves qui se joignirent à ce pieu dessein pour former ensemble une communauté. Mémoires archéologiques, t. xxvi. 1

abbaye

Elles prirent toutes ensembles avec Ingeltrude l'habit de pénitente et la reconnurent toujours pour leur Dame et leur abbesse, comme écrit Grégoire de Tours, lib. IX. Hist. des Francs, chap. XXXIII, qui ajoute même qu'elles en firent élection.

Ingeltrude ne se montra pas seulement la première à commander, mais aussi à pratiquer tous les exercices de vertu et de piété dont elle était un exemplaire. Leur principal office était l'oraison, la prière et l'assistance à la psalmodie qui se chantait continuellement dans Saint-Martin ; c'est ce qui obligea les moines de Saint-Martin de leur accorder un certain espace dans l'église, séparé du commun et fermé de treillis, pour donner lieu à ces saintes filles d'entendre l'office avec plus de commodité et de récollection par cette clôture.

Ingeltrude y fit élever un autel sous le titre du Crucifix, qui se trouva dans la suite incommode pour sa situation, qui se rencontrait au milieu de la nef; c'est ce qui porta, longtemps après, les chanoines de l'église de Saint-Martin de demander le consentement d'Hermengarde de Montloe, abbesse de Beaumont, pour transporter cet autel dans une chapelle de la même église, du côté du septentrion ; cela se fit en L'an 1179, et ce lieu retient encore aujourd'hui le nom de la chapelle du Crucifix vert, dont le chapelain est à la collation de Mme l'abbesse de Beaumont; car nous allons voir dans la suite, comme le monastère de l'EcrignoIe s'étant augmenté d'un grand nombre de religieuses qu'un lieu resserré dans des bornes trop étroites ne pouvait contenir, et l'usage de chanter l'office divin ayant été introduit et établit en France pour les monastères des filles, fut transféré à Beaumont par Hervé, trésorier de Saint-Martin : et la chapelle de Nostre-Dame-de-1'Ecrignole érigée en titre de paroisse, l'an 1211, dont la nomination est demeurée attachée à l'abbaye de Beaumont.

Entre les premières qui se consacrèrent à Dieu dans ce monastère de l'Ecrignole fut Bertegunde, veuve et fille de la même Ingeltrude.

 Il y avait eu un peu devant cette retraite de Bertegunde, un grand procès entre sa mère Ingeltrude et elle, pour une donation faite par Bertram, archevêque de Bourdeaux, fils d'Ingeltrude, en faveur du mary de Bertegunde; Childebert, IIe du nom, roi de France, députa Grégoire, archevêque de Tours, et Mérovée, évêque de Poitiers, pour terminer ce procès, en qualité de commissaires. Mais ils trouvèrent les esprits si échauffez et si altérez qu'ils ne purent les faire entrer dans des sentiments de paix et accorder le différend; néanmoins l'affaire s'étant dans la suite pacifiée d'elle -même, Bertegunde, étant devenue veuve, se retira avec sa mère au monastère de l'Ecrignole, comme aussi deux nièces d'Ingeltrude, filles de ses soeurs, Chunsene et Clodesinde, prirent le même parti et y profitèrent tellement dans la vie spirituelle, que l'une des deux succéda, après la mort de sa tante, au gouvernement et conduite de ce saint monastère.

Plan de l'Abbaye de Beaumont lès Tours en 1790

Ingeltrude avait cette pieuse coutume, avec sa communauté, de recueillir et amasser l'eau que l'humidité de l'air et du lieu faisait couler du tombeau de saint Martin et la ramasser "dans des vaisseaux, pour la conserver et distribuer aux malades, qui en recevaient souvent la santé.

Il arriva un jour, au rapport de Grégoire de Tours, qu'un saint prêtre breton de nation, eut recours à elle pour lui demander de cette eau salutaire, mais s'étant trouvée alors dépourvue de la provision ordinaire qu'elle en faisait, elle fit porter un peu de vin dans un vaisseau sur le tombeau de saint Martin qu'elle fit retirer le lendemain, après qu'elle y eut passé la nuit; puis elle fit appeler ce saint prêtre, qui lui avait demandé l'eau qu'elle avait soin de ramasser dans les temps humides, et lui présentant ce vaisseau de vin, lui dit : Prenez ce vase et mettez- y une goutte de ce peu d'eau bénite qui me reste et l'emportez ; mais ce fut une chose merveilleuse que, d'une seule goutte, ce vaisseau, qui n'était pas à demi plein, se trouva tout rempli de vin, dont ce saint personnage et sa compagnie ayant été surpris, expérimentèrent une seconde fois la même merveille dans un autre vaisseau, où on fit la même épreuve. Le cardinal Baronnius écrit que de là prit origine une coutume de donner du vin bénit et sur lequel on avait invoqué le nom de Saint-Martin, que l'on buvait ensuite en marque d'union et de charité les uns aux autres; mais, par malheur, cette sainte coutume de boire le vin de la Saint-Martin est passée d'une piété en débauches, et d'une dévotion en ivrognerie, ce que déplore ce savant cardinal en ses annales.

Ce monastère a fleuri en piété, au même lieu de l'Écrignole, jusqu'au temps qu'un accident donna lieu à Hervé, trésorier, de le transporter au lieu de Beaumont, où il s'est établi et accru dans la magnificence qui se voit aujourd’hui.

Il arriva un incendie si général dans la ville de Tours, que Saint-Martin et vingt-deux autres églises furent enveloppées et ruinées dans les flammes ; un vieil fragment mss, imprimé parmi les historiens de M. Duchesne, met le temps de cet accident à l'an 994; mais une autre chronique, tirée de la bibliothèque de M. de Thou, rapporte cela à l'an 997, le sixième du règne de Robert, ce qui est d'autant plus croyable que cet auteur en rapporte le détail et les circonstances ; voici ses paroles :

 « l'an de la nativité de Jésus-Christ, 997, le 6 du règne de Robert, le châteauneuf de Saint-Martin fut brûlé avec son église, et vingt-deux autres églises, le 8 des calendes de aoust, sçavoir : du côté de l'orient, depuis Saint Hilaire jusqu'à Nostre-Dame-la-Pauvre (dite maintenant la Riche), et du costé du midy, depuis la porte de Saint Pierre-du-Chardonnet jusqu'à la rivière de Loire (1) » de sorte que l'église et monastère de l'Ecrignole furent consommez par les flammes qui n'épargnèrent rien dans toute celte étendue.

Le bruit d'une perte si considérable se répandit bientôt partout le royaume. Adelaïs, impératrice, veuve d'Othon, envoya une grande somme d'argent pour la réparation de l'église du cloitre de Saint-Martin; elle envoya aussi en même temps le manteau impérial de son fils Othon, dont il s'était servi à la cérémonie de son couronnement, pour faire un ornement d'autel.

Cette princesse recommanda à celui qu'elle avait député pour faire son offrande, de faire cette prière aux pieds de saint Martin: « Recevez, grand évesque et serviteur de Dieu, ce petit présent que vous envoyé Adelaïs, humble servante des serviteurs de Dieu, de soy mesme pécheresse, mais, par la miséricorde de Dieu, impératrice, recevez ce manteau impérial de son fils unique Othon, intercédez pour elle auprès de celuy que vous avez revestu en la personne du pauvre. »

Plusieurs autres princes et grands du royaume étendirent leurs libéralités qui donnèrent lieu à Hervé, trésorier de Saint-Martin de Tours, de réparer la perte causée par cet incendie, tant en l'église de Saint-Martin qu'au monastère de Notre-Dame-de- l’Ecrignole dont il prit, un soin tout particulier.

 Et comme l'abbaye de Beaumont où il les transféra, le reconnait pour son bienfaiteur, il ne sera pas hors de propos d'écrire ici l'éloge de cet homme qui a paru d'un mérite extraordinaire; ce que je ferai, en rapportant ce qu'un célèbre auteur de ce temps a laissé pour conserver la mémoire de la sainteté et de la piété d'un si illustre personnage; il me semble que je dois cela pour seconder les devoirs que lui rend tous les jours cette abbaye qui récite journellement un psautier pour lui, et nous reprendrons ensuite le fil de notre discours.

Cet auteur, après lui avoir donné la gloire d'avoir réparé les ruines de l'église et du cloitre de Saint-Martin, tache de nous tracer un petit abrégé de sa vie, de laquelle, dit-il, si on pouvait faire un écrit entier, depuis sa jeunesse jusqu'au temps qu'il écrivait ce peu d'actions qu'il donnait au jour, on ferait voir un homme d'un mérite incomparable, et puis il commence en ces termes (2) : « Hervé tira sa naissance des

plus nobles du royaume, mais il était encore mieux conditionné de l'esprit que du sang ; ses parents que la noblesse enflait beaucoup d'orgueil et de fierté, eurent soin de l'élever chez eux dans cet esprit de grandeur, mais Dieu le disposait à d'autres grandeurs par des sentiments d'humilité. Il fut ensuite poussé aux études, mais il se contenta d'en acquérir autant qu'il était nécessaire pour son salut, sans en vouloir faire un fonds de vanité et de présomption; c'est pourquoi, désirant de s'éloigner de ce grand éclat, qui perd la plus part des esprits, il se retira dans un monastère pour y demander l'habit; mais la noblesse de ses parents faisant appréhender quelque suite fâcheuse, s'il était reçu contre leur gré, cela fut cause qu'il fut refusé, néanmoins on lui donna parole que, pourvu que ses parents voulussent consentir à son désir, on lui donnerait satisfaction ; mais son père, ayant appris le dessein de son fils, vint aussitôt le retirer de force du monastère et le mena à la Cour du roi Robert, pour l'engager dans le monde.

Ce roi, qui était bon et pieu, bien loin de lui faire perdre le sentiment de sa vocation, au contraire il le loua et l'exhorta à conserver ce dessein; et, pour lui en faciliter le moyen, le pourvut des-lors de la Trésorerie de Saint-Martin de Tours, se proposant dans la suite de l'honorer de quelque évêché ; il lui en fit souvent les offres, mais il les refusa toujours avec beaucoup de générosité ; il se contenta donc de se charger du soin de l'église de Saint-Martin ; et aussitôt prenant un habit blanc de chanoine, il vivait à l'extérieur comme un chanoine séculier, mais il conservait l'esprit et l'intérieur d'un moine dans la pratique continuelle des mortifications et des austérités affligeant son corps de jeûnes, cilices et veilles; néanmoins il n'avait cette dureté que pour lui, étant plein de douceur pour les autres Le temps où il reçut du roi la Trésorerie de l'église de Saint Martin fut celui de son désastre et de son incendie ; il forma aussitôt le dessein de la rétablir et de la rendre plus considérable qu'elle n'avait jamais été; poussé de cette inspiration et secondé des aumônes et libéralités du roi et de plusieurs princes, il assembla des ouvriers et leur traça lui-même les plans et les dessins du bâtiment qu'il prétendait faire, et eut le bonheur de conduire cet ouvrage jusqu'à sa fin.

« Aussitôt qu'il fut achevé, il invita plusieurs évêques pour en solenniser la dédicace et la consécration, dont il fixa le jour à celui que cette église faisait l'ancienne dédicace et translation de saint Martin, qui arrive le 4 juillet ; il y remit ce même jour le corps de saint Martin, qui en avait été retiré pendant le temps qu'on bâtissait.

 Il est rapporté qu'un peu devant cette solennité, Hervé avait demandé à Dieu d'honorer cette fête de quelque miracle, pour la rendre plus célèbre ; mais comme il était dans cette prière, saint Martin lui apparut et lui dit, d'un accent de voix fort tendre : « Ce que tu demandes, mon fils, tu le peux obtenir, et même davantage, mais Dieu en a fait assez suffisamment pour le temps présent, et les autres que tu demandes ne serviraient pas davantage, parce que c'est maintenant le temps de recueillir la moisson de la semence qui a été jetée en terre, de sorte qu'on ne doit plus rien demander à Dieu que sa grâce et le salut des âmes ; sois assuré que je n'oublie point de prier pour ce sujet, et particulièrement pour ceux qui servent en cette église, car plusieurs d'entre eux sont attachez et trop appliquez aux affaires séculières ,et même engagez au service des armes et de la guerre, où plusieurs sont morts , et je te dirai confidemment que j'ai bien eu de la peine d'obtenir de Dieu qu'ils fussent retirez d'entre les mains des ministres et princes des ténèbres, pour les mettre dans le lieu de joie, de lumière et de rafraîchissement; c'est pourquoi achève ce que tu as commencé avec tant de piété ; Dieu a fort agréable ton travail et tes fondations. »

« Le jour de la consécration étant venu, il s'y trouva un grand nombre d'évêques, d'abbés et de fidèles de tout ordre, de tout âge et de tout sexe. Ce saint homme voulut faire part à cette assemblée de ce que Dieu lui avait révélé et de ce que saint Martin lui avait fait part en son apparition.

La cérémonie de la consécration étant achevée, il se sentit rempli de joie et de consolation intérieure, qui le portèrent encore à redoubler ses austérités et ses ferveurs dans l'oraison. Il choisit sa demeure en une petite cellule proche de l'église, où il passait son temps à chanter, prier et faire lecture; et, après avoir passé quatre années dans celte ferveur, il tomba malade à l'extrémité; le bruit s'en répandit aussitôt et plusieurs y coururent dans l'attente de quelque miracle, mais ce saint homme, les désabusant, demandait humblement leurs prières. Il expira en proférant deux fois ces paroles : Seigneur, ayez pitié de moi; et il fut enterré au même lieu où saint Martin avait reposé ci-devant que son église eut été réparée par les soins d'Hervé. Sa mort arriva l'an 1018, le mois d'avril. »

Voilà donc ce que cet auteur nous a donné de la vie et des actions d'Hervé et de l'histoire du rétablissement de l'église de Saint-Martin. Mais ce n'est pas la seule action où il ait fait paraitre sa piété et son zèle qui lui acquit l'estime de tout le monde, selon le témoignage d'Aimoin moine, son contemporain, dans l'épitre dédicatoire qu'il lui a adressée de la vie d'Abbon de Fleury.

Mais ayant remarqué que l'étendue du monastère de l'Ecrignole, où il ne restait plus que les restes de l'embrasement, était trop resserrée pour contenir un si grand nombre de filles, qui embrassaient la vocation religieuse, il jugea à propos de les retirer de ce lieu si étroit, pour les mettre plus au large et leur donner plus de commodité de chanter l'office divin, qui commençait d'être introduit dans les monastères de filles.

Il choisit donc le lieu de Beaumont, agréable pour sa situation et déjà fréquenté par un grand nombre de peuple qui portait dévotion à une image de Notre-Dame, dite des Miracles. Ce fut en cet endroit qu'il bâtit une église et une maison pour ces filles, qu'il dota richement, tant de son propre que du bien et des terres dépendantes de Saint-Martin.

Il obtint, pour ce sujet, des lettres patentes du roi Robert qui, non seulement donna son consentement pour cet établissement, mais encore donna ordre qu'on le bâtit de ses deniers. Il y ajouta de grands revenus et des privilèges dignes de la libéralité royale, dont il fit expédier une charte, datée du bois de Bologne, le 27 septembre de l'an 1007(3), aux clauses et conditions qu'elles chanteraient tous les jours l'office divin et qu'elles prieraient Dieu pour la prospérité de sa personne et de tous ses successeurs. Hervé ayant pris toutes les mesures justes et disposé l'église et le lieu pour la demeure des religieuses, il les tira de l'Ecrignole et les mena en ce lieu.

 Plusieurs princes, et grands seigneurs furent portés, par leur piété et par l'exemple du roi, à augmenter ce monastère de plusieurs biens et de beaux titres, entre-autres les ducs de Normandie, les comtes d'Anjou, de Berry, les ducs de Guyenne et comtes de Poitou, qui dotèrent plusieurs prieurés, églises et bénéfices qu'ils mirent à cette abbaye.

Le seigneur de Vierzon, frère d'Hervé, trésorier de Saint-Martin et bienfaiteur, donna l'église de Menetou, avec ses dépendances, où depuis fut établi une communauté de religieuses de Beaumont, comme fille dépendante de cette abbaye. De sorte que cette abbaye peut être comptée entre les principales et les plus illustres du royaume et considérée comme un chef d'ordre, mais, surtout, elle mérite cette louange d'avoir été la première du royaume qui ait embrassé d'elle- même la réforme et une sévère clôture, devant le concile de Trente, sous Françoise de Maraffin, abbesse; ce concile ordonna la réforme dans toutes les abbayes, mais celle-ci, où l'esprit de religion avait encore sa vigueur, s'était déjà fait cette loi de vivre dans une parfaite observance des règles monastiques, se soumettant volontairement aux supérieurs de l'ordre de Chézal-Benoist, dont elle recevait les visites.

 

La première qui porta le titre d'abbesse à Beaumont s'appelait Hersende, qui fut bénite par Hugue de Châteaudun, archevêque de Tours; et on observa depuis cette coutume, qu'après le décès de l'abbesse, on portait la crosse sur le tombeau de saint Martin, comme il se pratiquait déjà à l'abbaye de Cormery, par une manière de sujétion et de reconnaissance à la juridiction de cette église, dont elle avait reçu le fonds. Les abbesses qui sont entrées depuis cette première, soit par élection, soit par nomination du roi, dans le gouvernement de cette abbaye, en étaient investies par la crosse de Mrs du chapitre de Saint-Martin, auxquels elles prestaient serment de fidélité et d'obéissance, tant pour le temporel que pour le spirituel.

Cette juridiction déplut aux archevêques de Tours, qui ne furent pas longtemps sans leur contester ces droits. Ce procès eut différents périodes qu'il serait ennuyeux de rapporter, car il fut agité sous quatre différents archevêques, et enfin réglé pour le possessoire par le pape Innocent III du nom, l'an mil deux cens treize; et, comme la bulle de ce pape instruit de toutes les poursuites du procès et des raisons de part et d'autre, nous la donnerons ici en son entier; mais il est nécessaire de faire voir, devant, le dispositif de cette bulle.

Henriette-Louise-Marie-Françoise-Gabrielle de Bourbon - Condé,

Mademoiselle de Vermandois ; troisième fille de Louis III de Bourbon prince de Condé et de Mademoiselle de Nantes (fille légitimée de Louis XIV et de Madame de Montespan) ; Née le 14 janvier 1703

Henriette_Louise_de_Bourbon,_abbess_of_Beaumont-les-Tours

En 1725, Henriette Louise, ainsi que sa sœur Élisabeth Alexandrine était sur une liste des épouses potentielles présentées au roi Louis XV.  Son nom avait été placé sur la liste par son frère, le duc de Bourbon, qui était ministre en chef de Louis XV. En plus de sa maîtresse, madame de Prie, le duc voulait faire sa sœur la reine dans l'espoir de pouvoir influencer le jeune roi. Henriette Louise, cependant, ne voulait pas se marier du tout, en disant qu'elle voulait au lieu de devenir une nonne comme sa cousine Louise d'Orléans Adélaïde.

Ayant refusé d’épouser Louis XV,  elle prend l'habit de religieuse à l'abbaye royale de Beaumont-lès-Tours le 14 janvier 1727, tenue par l'archevêque de Tours et madame de Rochechouart-de Mortemart, abbesse de Beaumont; nommée abbesse de cette même abbaye en novembre 1753.

Etant abbesse, Henriette Louise leva sa petite-nièce, Louise de Bourbon Adélaïde (1757-1824). La jeune fille avait perdu sa mère, Charlotte de Rohan, à l'âge de deux ans. Louise Adélaïde a pris plus tard elle –même le  voile et est devenu l'abbesse de l'abbaye de Remiremont.

Henriette Louise mourut à l'abbaye de Beaumont-lès-Tours le 19 septembre 1772, après avoir survécu à tous ses frères et sœurs à l'exception de la princesse de Conti, et a été enterré le 8 Janvier.

 

 

L’abbaye possédait 12 prieurés. Elle fut fermée à la Révolution, mais un incendie de 1784 avait déjà pratiquement tout détruit.

En 1790, l'Abbaye royale de Beaumont était vendue comme bien national à un démolisseur et détruite jusqu'au sol.

 

 

PROCÈS-VERBAL D'ESTIMATION DE L'ABBAYE DE BEAUMONT.

20 janvier 1793.

Aujourd'hui vingt janvier mil sept cent quatrevingt treize, nous, Jacques-Louis-Marie Gautier, juré expert, professeur d'architecture à Tours, y demeurant, canton et paroisse de Saint-Martin,

Disons que le Directoire du district de Tours, après avoir entendu le procureur syndic, nous auroit nommé à l'effet de faire la description et estimation des domaines nationaux qui me seront indiqués par délibération en date du dix novembre dernier ; pourquoy, le Directoire m'ayant indiqué et requis de faire l'estimation du cy devant couvent et abbaye de Beaumont-lès-Tours, et de diviser en autant de parties que faire se pourra pour le profit de la nation, où nous aurons procédé ainsy qu'il suit :

Au désir de la commission sus datée, nous expert serions transportés sur et au dedans de la dite maison et enclos dont il s'agit ; visite et reconnaissance faite des dites dépendances, nous avons reconnu qu'elle se trouve divisée en trois enclos renfermés de murs de closture, dont nous aurions fait trois lots de vente dans l'ordre et détail qui suivent :

ARTICLE PREMIER.

Grande et belle cour d'entrée, ayant sa principale entrée par une porte cochère, précédée d'une closture en demy lune, sur la levée de l'avenue ou levée dudict lieu à Tours. Dans l'intérieur du mur de closture de ladite demy lune, deux puits avec chapelle en pierre.

Au couchant de la dite cour, un bâtiment de quarente cinq pieds de face sur dix-sept pieds hors oeuvres, composé de deux remises, deux écuries, grenier dessus, charpente en comble couverte d'ardoises.

Au levant dudict corps et nord de la susdite avant cour, une petite basse-cour, au nord de laquelle est une autre corps de bâtiment de quarante cinq pieds sur vingt sept pieds hors oeuvres, servant de grange, charpente en comble couverte d'ardoises.

En retour et levant de ladite grange, une petite écurie de quatorze sur dix-sept pieds, charpente en appentis, couverte de tuiles.

Au couchant de la susdite avant cour et remise cy dessus, est un corps de bâtiment neuf, y ayant son entrée, de huil toises et demie de face sur trente-trois pieds hors oeuvres, composé, au rez-de-chaussée, de quatre chambres à feu, entrée et escalier, idem au premier étage, grenier dessus, charpente en comble, couverte d'ardoises, une cave voustée dessous.

Au couchant dudit corps une petite cour de forme triangulaire.

Du même costé, proche le passage du cimetière, et au nord de la maison conventuelle, un autre pavillon neuf, de onze toises et demie de face sur vingt trois, pieds hors oeuvres, composée, au rez-de-chaussée de deux chambres à feu, quatre cabinets, entrée, escalier ; idem au premier, grenier dessus, charpente en comble, couverte d'ardoises; sous ledit bâtiment une cave voustée.

Au couchant dudit bâtiment, un jardin clos de murs, ayant une porte d'entrée sur le chemin dudit lieu à St-Sauveur, du même côté un puits couvert d'ardoises.

Au midy dudit jardin et bâtiments, est un passage de la susditte avant cour sur le chemin dudit lieu à Saint-Sauveur, ayant dix pieds proche l'entrée, et huit pieds aussy d'ouverture sur le chemin cy dessus de mur à mur, du susdit jardin à l'ancien cimetière, acquis par le citoyen Giton.

Au levant de la susditte avant cour, est un autre bâtiment, servant de remises et écuries, ayant quatre-vingt-sept pieds de face sur dix-huit pieds hors oeuvres, charpente en comble, couverte d'ardoises.

Au couchant et nord d'yceluy et levant de la demi lune, une basse-cour, au nord de laquelle est un autre corps de quarante-cinq pieds de face sur vingt-sept pieds, servant aussy d'écurie, grenier dessus, charpente en comble, couverte d'ardoises.

Au midi de la susditte avant cour, est le principal corps conventuel d'entrée, portant avant et arrière corps, ayant ensemble trente-une toises de face sur trente-trois pieds d'épaisseur réduitte hors oeuvres, composé, au rez-de-chaussée, de l'entrée principale conventuelle, plusieurs parloirs, six chambres à feu et cabinets, deux escaliers et descente aux caves voustées au-dessous ; au premier étage, une chambre à feu et plusieurs chambres sans cheminée, et la tour, qui a été brûlée, grenier dessus, présentement couvert en tuiles ; au dit étage, sur la partie au couchant, sont trois chambres à feu, boisées de hauteur, plusieurs cabinets dont un boisé, aussi de hauteur, aisances, grenier en mansardes en galetas, greniers sur le tout, charpente en comble couverte d'ardoises.  

Au midy et en retour du susdit grand corps, est un autre bâtiment de vingt-huit pieds sur vingt toises de face, composé, au rez-de-chaussée d'une grande galerie, au levant d'icelle sont plusieurs pièces sans cheminée, un escalier, caves voustées dessous, au premier étage une galerie, deux appartements boisées, leurs entrées et cabinets, grenier dessus, charpente en comble couverte d'ardoises.

Au couchant dudit corps est un autre petit bâtiment de quinze sur vingt-deux pieds, composé, au rez-de-chaussée, d'une chambre sans cheminée; idem au premier étage, grenier dessus, charpente en comble, couverte d'ardoises; au midy et couchant dudit petit corps, est une petite cour en forme de hache. ……

 

Au bout de ladite terrasse, costé du levant, un autre pavillon, de vingt-sept sur trente pieds; au rez-de-chaussée, une chambre de jardinier; au premier, un salon à cheminée, avec manteau, tablette et lambris d'appui en porcelaine; grenier dessus, charpente en pavillon, couverte d'ardoises; au midy dudit salon un perron en pierre dure.

Au nord dudit pavillon, en saillie sur le jardin de l'article premier cy-dessus, sont plusieurs parties de rampes d'escaliers en pierre dure, qui descendent au jardin, à démolir et reconstruire au niveau du mur des aisances, en maçonnerie ; ne sera conservé que celuy qui conduit au cabinet d'aisance, avec siège à l'anglaise, et les murs revestis de stuc; sera également tenu, ledit adjudicataire, de condamner en maçonnerie toutes les ouvertures qui sont sous la terrasse donnant sur l'article premier cy-dessus, avec faculté d'y conserver, à son besoin, des soupiraux, en se conformant aux coutumes, et à ses frais.

Lequel dit jardin potager, et pavillons, terrasse, joignant au levant le citoyen Genest, du couchant au chemin dudit lieu à Saint-Sauveur et au citoyen Dufour, du nord à l'article premier cy-dessus, du midy les prés des citoyens Boulard et Mangeant. Lequel dit article estimé la somme de quinze mille livres, cy 15,000 liv.

Dont et de tout ce que dessus avons fait et dressé le dit procès-verbal, pour servir et valoir ce que de raison, après y avoir vacqué, tant sur les lieux qu'a là rédaction du présent, quatre journées ; clos et arrêté à Tours, le vingt six janvier audit an, l'an premier de la république française.

Signé : C. GAUTIER.

 

L'adjudication n'eut lieu que le 24 ventôse an VI (14 Mars 1798), l'abbaye et les bâtiments, cours et jardins en dépendant, avaient été divisés en sept lots qui tous, sauf le troisième, adjugé à François-Mathieu Texier, d'Azay-le-Rideau, furent; acquis par Charles Guiot, expert, agissant au nom et comme fondé de pouvoirs de Philippe-Joseph Dutordois, demeurant à Paris, rue du Mail.

 

 

Cette abbaye vient se rappeler aux souvenirs des Tourangeaux grâce aux fouilles archéologiques entreprises en 2019 sur le site des casernes Beaumont-Chauveau.

 Mémoires de la Société archéologique de Touraine

Tours : l'Abbaye royale de Beaumont redécouverte sous les casernes Beaumont-Chauveau

En 1790, l'Abbaye royale de Beaumont était vendue comme bien national à un démolisseur et détruite jusqu'au sol. Cette abbaye vient se rappeler aux souvenirs des Tourangeaux grâce aux fouilles archéologiques entreprises sur le site des casernes Beaumont-Chauveau.......

Pour l'instant, plusieurs trouvailles comme une pièce de monnaie en argent datée entre 810 à 840 atteste de l'occupation des lieux bien avant l'abbaye et les archéologues ont aussi retrouvé de la vaisselle cassée datée cette fois des XVIIième et XVIIIième siècles.



https://www.francebleu.fr

 


  1. Ce passage, qui donne la date la plus probable de l'incendie de Châteauneuf, placé tantôt en 994, tantôt en 1001, se trouve dans la chronique de saint Martin, publiée par Salmon, p. 218 des Chroniques de Touraine, sauf toutefois l'indication de l'année du règne du roi Robert, qui a été sans doute intercalée, et est inexacte.
  2. Dom Marlène, Thésaurus anecdolorum, t. III, col. 1688-1692. Reproduit presqu'intégralement par Monsnier, Hist. sancti Martini Ecclesioe, p. 203. Bibliot. de Tour».
  3. Gallia Christiana, Instrumenta, t. XIV, col. 63.

 

 

Chronologie des ROIS, COMTES, DUCS, etc. qui ont gouverné La TOURAINE

(Croisade de Geoffrey Martel, Ier, comte d'Anjou et de Touraine - Bataille de Gonfanon) Jules César arrive dans les Gaules l'an de Rome 696, environ 58 ans l'ère vulgaire. Depuis ce temps, les Turones restent sous la domination des Romains pendant l'espace de 538 ans, sous des comtes ou gouverneurs dont beaucoup nous sont inconnus.....

 

Carte des plus anciens châteaux de la Touraine

Visiter les châteaux de la Touraine, c'est, en faisant une charmante promenade, surprendre, en des exemples d'une beauté incomparable, toutes les transformations successives, qui, du château-fort édifié dans un but de pure défense, sont arrivées à faire la plus séduisante résidence de plaisance conçue par le génie d'un architecte.....

 

La Reconstruction Monastique dans l'Ouest : L'Abbé Gauzbert de Saint-Julien de Tours (v. 990-1007) -
Si pour les provinces de Maine, Anjou, Touraine, on établit une comparaison entre la carte monastique du IXe siècle et celle, du XIe , à la veille de la vague du nouveau monachisme, on se rend tout de suite compte des profonds bouleversements que les invasions normandes et les incursions bretonnes ont causé directement ou indirectement au monachisme .....

 

Pèlerinages et Culte populaire de Saint Martin de Tours, apôtre des Gaules.

Pendant tout le moyen-âge, le tombeau de saint Martin a été en France le foyer le plus actif de l'influence chrétienne et civilisatrice. A cette époque de transformation profonde, l'Église était le seul salut de la société. En dehors d'elle, il n'y avait ni législation, ni justice, ni administration.





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PHystorique- Les Portes du Temps
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