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PHystorique- Les Portes du Temps
5 juin 2020

Introduction du christianisme chez les pictons, période marquant la fin de l’Antiquité et le début du Moyen-âge

Introduction du christianisme chez les pictons, période marquant la fin de l’Antiquité et le début du Moyen-âge

Pendant que les Gaules voyaient s'élever sur leur sol humilié, les temples des divinités romaines ; qu'elles recevaient dans leurs propres sanctuaires, les dieux des conquérants à côté de leurs dieux vaincus, et que ceux des druides qui résistaient à l'introduction de ce culte bâtard dérobaient avec peine leurs têtes à la persécution, un enfant naissait à Bethléem, petite ville de Juda, grandissait à Nazareth, lui, fils des rois, dans un atelier de charpentier, puis tout à coup laissant la hache, la scie et le rabot, s'avançait au milieu des peuples, parlait du royaume de Dieu, et disait : « Je suis celui qui doit venir, le désiré des nations, le Christ, fils du Dieu vivant. » Il prenait les prophéties, conservées comme lois de l'Etat, et montrait comment elles s'accomplissaient en sa personne; il guérissait les malades, ressuscitait les morts, opérait devant la multitude étonnée des prodiges innombrables, prophétisait le succès et la perpétuité de son oeuvre, et mourait sur une croix. Sorti vivant du tombeau le troisième jour après sa mort, selon qu'il l'avait prédit, il apparaissait à ses disciples, et après avoir été vu par plus de cinq cents personnes à la fois, il montait au ciel en présence de ses apôtres.

Ceux-ci, devenus intrépides, de timides qu'ils étaient, entreprennent la conquête du monde, et la croix à la main, se répandent chez tous les peuples pour les soumettre à la loi du crucifié, et, par un prodige nouveau, les peuples entendent leur voix, renversent les autels de leurs dieux, brûlent ce qu'ils avaient adoré et adorent ce qu'ils avaient brûlé. La lutte fut longue et sanglante; mais la victoire demeura aux désarmés, aux persécutés, aux morts, et le monde admira ce grand spectacle du faible renversant le puissant, du droit triomphant de la force brutale.

La superbe Rome a tremblé à la voix de Pierre, déjà Marseille a reçu dans son port les envoyés du vicaire de Jésus-Christ. Parmi ces conquérants moins cruels que César est un homme appelé Martial. On l'a vu à la suite du Sauveur, parmi les soixante -douze disciples. Il est revêtu du caractère épiscopal, et fixe son siège à Limoges. « Mais d'autres contrées, dit M. de Chergé, sollicitent le zèle infatigable de Martial, car elles sont plongées dans les ténèbres épaisses du paganisme, et il a été dit qu'il devait être l'apôtre d'une grande partie des Gaules.

Il se rend donc à Poitiers. La capitale des Pictons accueille la prédication évangélique. Une église bien humble s'élève sur les lieux mêmes où brille aujourd'hui une cathédrale immense, et, si elle est placée, dès le principe, sous l'invocation de saint Pierre, le chef des apôtres, c'est qu'au moment où le temple saint était dédié au Très-Haut, une révélation apprenait au disciple fidèle que son noble maître scellait de son sang, dans la capitale de l'univers chrétien, les vérités qu'il avait annoncées au monde...

« Le saint ne s'effraie point en voyant de quel prix Dieu paie les travaux de ses serviteurs. Il parcourt en tous sens le midi des Gaules, depuis les monts Pyrénéens jusqu'aux rives de la Loire et du Rhône; et c'est après 28 années de fatigues, de courses et de prédications que le saint apôtre termine en paix, au sein de sa ville épiscopale, une vie pleine de mérites et de gloire » (1).

 

« C'est d'un compagnon même de Jésus-Christ, nous écrierons-nous avec le pieux auteur, que nous avons reçu la prédication évangélique. Pour arriver jusqu'à nos heureux pères, l'enseignement du divin maître n'emprunta pas d'autre intermédiaire que la voix inspirée d'un de ses disciples, écho fidèle de la parole qu'il avait recueillie lui-même sur les lèvres du Sauveur; c'est à cette source immédiate et pure que nous avons puisé la doctrine, et c'est peut-être à cette faveur insigne que nos populations religieuses ont dû cette foi robuste qui, aux jours des plus lâches et des plus universelles défaillances, enfantait chez nous des héros chrétiens, des confesseurs et des martyrs (1). »

Au moment où Martial arbore l'étendard de la croix dans le Poitou, une longue guerre commencé entre trois religions positives. Toutes les trois s'appuient sur des faits de l'ordre surnaturel; mais une seule peut prouver que les faits sur lesquels elle s'appuie, sont à la fois réels et divins.

 Le christianisme a pour lui la vérité; il a contre lui les passions humaines, et ces passions ont à leur solde les Gaulois et les Romains, le petit peuple et les grands, les prêtres des faux dieux, les guerriers et les magistrats.

 Le sang des chrétiens coule dans les Gaules comme dans le reste de l'empire, et Nectaire (2), premier évêque connu de Poitiers, nous apparaît avec la palme du martyre.

 A cette époque, le travail lent mais opiniâtre de la propagande chrétienne laissait déjà des traces profondes dans le sol des Pictons occidentaux.

Introduction du christianisme chez les Pictons - période marquant la fin de l’Antiquité et le début du Moyen-âge(Signe du Triomphe - Puy du Fou)

 Des médailles, des poissons symboliques (3), des tombeaux chrétiens, mêlés à une foule d'objets païens, attestent les succès encore incomplets, mais solides, des prédicateurs de l'évangile.

Le sacerdoce des Césars et le sacerdoce druidique, appuyés, l'un par le glaive des vainqueurs, l'autre par les sympathies populaires, résistaient aux efforts des missionnaires, et, dans un grand nombre de lieux, les autels de l'erreur restaient encore debout.

 

La conversion de Constantin, l'épiscopat de saint Hilaire et l'apostolat de saint Martin de Tours changèrent la face des choses.

Avec Constantin le christianisme montait sur le trône; sa doctrine s'affirmait sous la plume de saint Hilaire, et ses pratiques montraient leur supériorité sur celle des religions rivales par les miracles de saint Martin. Le culte des Césars expirait; le druidisme s'abîmait dans la magie ; l'église de Jésus-Christ étendait et affermissait son empire.

Mais les barbares d'outre-Rhin envahissaient les Gaules, et menaçaient d'une destruction soudaine l'ouvre commencée de la civilisation chrétienne.

Le clergé catholique ne se laissa pas décourager. Le clergé catholique, vit dans ces ennemis nouveaux des hommes à sauver. Il se remit courageusement à l'œuvre, opposa la douceur à la férocité, la science à la barbarie, et la force morale triompha encore une fois de la force matérielle.

On arrivait au Ve siècle. Divers éléments venaient s'allier aux éléments anciens dans le pays des Pictons. Les Huns, commandés par Attila, y firent des incursions, y exercèrent des ravages : leurs hordes impies passèrent comme un torrent sur cette terre désolée, sans pourtant y faire d'établissements durables. Vers la même époque, parurent les Theiphaliens.  

Ils étaient, croit-on, originaires de Scythie.

Ils occupèrent la contrée qui s'étend de Tiffauges à St-Sigismond et des environs d'Oulmes, à une limite inconnue du côté de l'occident, mais se trouvant sans doute entre Fontenay le Comte et Sainte-Hermine.

Délimitation du Pays des Mauges avant le XIe Siècle (carte)

Jusqu'au IXe siècle, le diocèse de Poitiers avait au nord- ouest la même limite que le pays des Pictons, c'est à dire la Loire, depuis son embouchure jusqu'à son confluent avec le Layon (1). Ce sont les conquêtes des rois bretons qui portèrent atteinte à l'intégrité de cette vaste circonscription.

Ils donnèrent leur nom à Teiphal ou Tiffauges, qui dépend aujourd'hui du diocèse de Luçon, et ils se mêlèrent dans le Bocage aux populations indigènes sans les absorber : ils se laissèrent au contraire absorber par elles. Il n'en fut pas ainsi vers le golfe des Pictons, qui était plus désert.

 Après avoir parlé des Teiphaliens, Thibaudeau ajoute : « Il y avait encore au XIre siècle, sur les confins du Poitou et de l'Aunis, un canton qui n'était habité que par ces peuples.

 L'attachement qu'on avait pour les meurs et lesusages de ses pères empêchait les différents peuples de se confondre, quoiqu'ils habitassent le même pays. Ces hommes féroces vivaient au milieu des halliers et des marais impénétrables de l'ile de Maillezais.

On découvrit, il y a quelques années, en fouillant la terre près de Maillezais, dans la paroisse de St-Sigismond, des squelettes d'une longueur extraordinaire; les crânes étaient fort gros, et les os des bras et des jambes extrêmement allongés. Cette découverte prouve que ce pays était habité par des hommes beaucoup plus grands de taille que les Gaulois.

 Ces hommes étaient des Scythes ou Alains, à qui Ammien-Marcellin attribue une taille très-avantageuse : ces peuples ressemblaient aux Bourguignons, qui, au rapport de Sidonius, avaient sept pieds de haut, on les comparait à des géants » (4).

 C'est à Maillezais ou dans ses environs que l'on place le Port-des-Deux-Corbeaux. Strabon dit que, si l'on en croit Artemidore, il existait, sur la côte de l'Océan, un port appelé le Port-des-Deux-Corbeaux, parce qu'il s'y trouvait deux de ces oiseaux à l'aile droite blanchâtre. Les personnes ayant ensemble quelques contestations s'y transportaient, plaçaient une planche en un lieu élevé, et, sur cette planche, des gâteaux. Chaque partie disposait les siens de manière à ce qu'on ne pût les confondre; puis les corbeaux s'abattaient sur les gâteaux, mangeaient les uns, culbutaient les autres, et celle des deux parties qui avait eu ainsi ses gâteaux culbutés, triomphait.

 

Le port dont nous venons de parler, donnait son nom à la partie du golfe qui l'avoisinait, et, dans cette partie du golfe, était l'archipel formé par Maillezais et un nombre assez considérable d'autres îles.

Ces îles, dit M. Lacurie, étaient habitées par les Santones liberi, qui s'étendaient aussi de l'autre côté de la Sèvre-Niortaise. « Comment cette peuplade n'avait-elle pas été asservie par les dominateurs de la Gaule ? Comment était-elle restée libre ? »

L'histoire ne répond pas à ces questions que s'adresse le docte auteur de l'Histoire de l'Abbaye de Maillezais.

 

Il poursuit en ces termes :

« Toujours est-il que les Romains n'ont laissé dans ce vaste territoire aucune trace de leur passage. Rien ne pouvait en effet tenter la cupidité du soldat dans une population uniquement occupée de la pêche et n'ayant pour toute fortune que quelques barques et des filets. »

Puis il ajoute : « M. Charles Arnaud, dans son Histoire de Maillezais, désigne cette population sous le nom de Colliberts, déplorables restes dit-il, des Agésinates Cambolectri » (5); nous respectons l'autorité de M. Arnaud; mais, à notre avis, cet écrivain n'est pas dans le vrai, malgré sa science incontestable.

Les Agésinates étaient plus à l'est, renfermés dans l'immense fer-à-cheval que décrit la Charente depuis sa source jusqu'aux environs de Bassac.

Quant au nom de Colliberts, que nous trouvons dans les anciens chroniqueurs, nous l'adopterons volontiers, si on veut lui faire signifier réunion d'hommes libres, Conliberti. M. de la Fontenelle de Vaudoré, a donné le premier une entorse au texte de Pline, qu'il tronque à plaisir pour le plier à son système.

« Pline énumérant les peuples de l'Aquitaine, part de la Loire, et nomme les Ambilatres, les Agnunates, les Pictones, les Santones Liberi; puis franchissant la Garonne, il désigne les Biturices Vivisci, et les diverses peuplades du midi jusqu'aux Pyrénées.

De là, il remonte à l'est, arrive aux Agésinates Cambolectri, limitrophes des Pictones, passe aux Biturices Cubi, dans l'Indre et le Cher, puis aux Lemovices et aux Avernes, pour retourner sur les marches de la Narbonnaise, où il trouve les Rutènes, les Cadurques, les Autobroges et les Petrocores.

Rien dans le texte qui autorise à placer les Agésinates à l'ouest des Pictones; tout porte au contraire à leur assigner la position géographique que nous leurs faisons, joignant les Pictones, mais à l'est » (6).

De ces opinions je rapproche celle de l'auteur du Dictionnaire classique de géographie ancienne, qui divise les peuples Pictons nommés Agésinates, en Combolectres et en Atlantiques.

Les premiers auraient occupé ce que nous appelons aujourd'hui l'Angoumois; les seconds se seraient établis dans le pays où se trouve Aizenay, Asianensis, qu'ils auraient eu pour capitale.

Ces deux branches d'une même famille se seraient divisées suivant l'usage des peuples anciens, et le vaste désert qui séparait alors le pays d'Angoulême de celui d'Aizenay, leur aurait livré un terrain libre, où quelques-uns d'entre eux seraient restés.

Il serait facile de comprendre alors comment les Teiphaliens auraient repoussé quelques tribus dans les îles entre Maillezais, Marans et Luçon.

Les vaincus auraient conservé, avec leurs habitudes et leurs meurs, leur vieux nom de Colliberts, qu'ils portent encore en même temps que le nom plus moderne de Huttiers.

 

L'empire romain s'affaiblissait de plus en plus dans sa longue agonie.

 En 419, Honorius céda aux Visigoths l'Aquitaine, qu'il ne pouvait défendre. Les Visigoths étaient Ariens; chez les Pictons tout ce qui était chrétien, était catholique. Le grand saint Hilaire, évêque de Poitiers, mort en 367, avait brillé, comme un astre dans le monde entier. Sa doctrine parlait encore après lui, et son glorieux souvenir fortifiait les peuples, surtout ses anciens diocésains, contre les assauts de l'hérésie.

Ceux des Pictons qui avaient embrassé la foi, se montraient inébranlablement attachés au symbole de Nicée, et la différence des croyances creusait comme un abîme infranchissable entre les vainqueurs et les vaincus.

L’empire romain trop fragile, s’effondre en 476 et les Barbares prennent le pouvoir. Ils fondent alors de nouveaux royaumes.

 

 Cette période marque la fin de l’Antiquité et le début du Moyen-âge

Toute fusion devenait impossible, et les haines semblaient devoir s'éterniser lorsque Clovis parut sur la scène du monde.

Clovis commandait aux Francs, peuple nouveau formé par l'association de diverses tribus germaines. Tandis que tous les autres rois étaient engagés sous le drapeau de l'erreur, Clovis se déclarait catholique, et méritait par- là les titres de roi très-chrétien et de fils aîné de l'église.

Les Pictons virent en lui un sauveur. Ils lui députèrent, sous la conduite de Saldebrodus, seigneur puissant dans la contrée, des hommes considérables qui lui exposèrent le malheur des provinces conquises et le supplièrent de les délivrer.

Le fondateur de la monarchie française reçut favorablement leur supplique, et déclara la guerre aux Visigoths. Un choc terrible eut lieu à Vouillé, non loin de Poitiers. Dieu protégea les Francs, et, pour que leur victoire fût décisive, Clovis tua de sa propre main Alaric, roi des Visigoths. L'incorporation de l'Aquitaine dans son empire fut le fruit de son triomphe.

 

- Vers 576, décès de saint Senoch, abbé "Teiphale" originaire de Tiffauges (Grégoire de Tours).

Le Poitou devint une province française, et, si la France portait le titre de fille aînée de l'église, le Bas-Poitou, sous le nom de Vendée, s'inscrira un jour parmi les provinces les plus chrétiennes de la France.

Nous verrons le sentiment religieux dont nous avons signalé la présence, se développer sous une influence meilleure que celle du druidisme, et la civilisation chrétienne, se faisant jour à travers les meurs barbares, remplacer la civilisation incomplète des fausses religions.

 

 

 

 

 

Histoire des moines et des évêques de Luçon, De Du Tressay

Histoire littéraire du Poitou: Continuée jusqu’en 1840 De Dreux du Radier

 

 

 

==> Quand Poitiers s’appelait Limonum capitale des peuples Pictavi et Tiffauges, Theiphalia

==> Lacus Duorum Corvorum, la légende du Marais Poitevin

==>Lacurie (abbé). Carte du Golfe des Santons, Pictons sous les Romains

==>Hilarius Pictaviensis (Saint Hilaire de Poitiers) évêque de Pictavium (Poitiers)

==> Carte des Gaules lorsque Clovis vint y jetter les Fondements de la Monarchie Française

==> Clovis et l'énigme des sarcophages tombée du ciel à Civaux : Lemovices et Pictons, le christianisme en Poitou

==>Les colliberts, collibertus, culvert, huttiers et nioleurs des marais de la Sèvre du Bas Poitou

 ==> Topographie du Mont-Glonne et l’Occupation de son territoire par les Romains, les Wisigoths et les Franks.

 

 

 

 

 

 


 

(1) M. Ch. de Chergé, Les vies des Saints du Poitou.

(2)

SAINT NECTAIRE (Nectarius) ne paraît ni dans le catalogue des évêques de Poitiers de dom Denys de Sainte-Marthe, ni dans celui de ses oncles. Ces derniers commencent par Libérius. Dom Denys de Sainte-Marthe a rejeté tous ceux qui ont précédé saint Hilaire, parce qu'il n'a rien trouvé qui pût justifier leur épiscopat.

Un mémoire de M. l'abbé le Boeuf, prouve qu'on doit admettre saint Nectaire, ou Nectarius, au nombre des évêques de Poitiers, qui ont précédé saint Hilaire.

Suivons M. l'abbé le Bæuf dans ses raisonnements critiques : ils sont solides. Ce qui a empêché, dit-il, messieurs de Sainte-Marthe de placer Nectarius à la tête de leur catalogue, est la méprise de M. de la Rocheposay dans ses Litanies Poitevines, où il donne pour premier évêque de Poitiers un Victorin, qu'il confond dans ses notes avec le Victorin martyr et écrivain, dont parle saint Jérôme, et dont on a fait un évêque de Poitiers, parce qu'on a confondu-la ville de Pettaw en Stirie , appelée en latin Pettabionum, avec Poitiers (Pictavium) comme l'a judicieusement remarqué le docte Launay.

Ils ont trouvé dans le catalogue de Besly, que Nictarius y était appelé indifféremment Victorinus.

Les notes de Besly tombent toutes sur le Victorin de Pettaw. Cette découverte leur a fait conclure que Nectaire n'étant que le faux Victorin , il fallait exclure Nictaire ou Nectaire. La conséquence était juste : mais le principe était faux.

VICTORIN, premier évêque de Poitiers, n'est point admissible; c'est une chimère : mais Nectaire n'avait rien de commun avec lui, et c'est ce que n'ont pas examiné les auteurs du Gallia Christiana.

 Il a réellement existé, et la qualité d'évêque de Poitiers lui est due. Prouvons-le d'après M. l'abbé le Boeuf.

On conserve dans la bibliothèque du roi (Cod. 4955) un Catalogue des évêques de Poitiers écrit vers le milieu du quatorzième siècle. Il commence par Nectarius.

 Ses successeurs sont Liberius, Tripidianus , Agon, Hilpidianus, Justinianus, Bellator , Aliphius , Hilarius qui n'est que le neuvième évêque. Ces prélats n'y sont point avec la qualité de saint.

Jean Chenu, qui fit imprimer en 1621 une histoire chronologique de tous les évêques de France, met à la tête du catalogue des évêques de Poitiers sanctus Nictarius. Il avait copié les catalogues des églises de France, tels qu'il avait pu les trouver.

Jean Bouchet, qui a donné deux fois la liste des évêques de Poitiers, l'une à la tête de ses Annales, l'autre dans le corps de son histoire, emploie à la tête Nictarius , Liberius, etc.

Ici M. l'abbé le Boeuf fait une remarque bien juste. Quand nous voyons, dit-il, deux noms qui se ressemblent, soit par le son, soit par la signification, tels que Tupianus et Hilpianus Tripidianus et Hilpidianus , Agon et Pellator, qui signifient la même chose, l'un en grec, l'autre en latin, on peut soupçonner avec raison que la duplication des personnes a été faite, ou par erreur, ou par le désir de faire remonter la suite des évêques jusqu'à Jésus-Christ ; mais Nectarius ne ressemble point à Libérius.

Il y a plus, continue notre savant abbé, Nectarius a été constamment reconnu pour saint par ses successeurs, et par le corps monacal, qui desservait, sous la première et seconde race de nos rois, la célèbre abbaye de Saint-Hilaire. En voici la preuve:

Clovis 1er ou peut-être Clovis II (l'époque remontera encore au septième siècle) donna à Saint-Hilaire de Poitiers une terre située au diocèse d'Auxerre, appelée Longum-Rete (1), Long-Ré. A Long-Ré il y avait un monastère dès l'an 700, au plus tard.

Saint Tétrice, évêque d'Auxerre, en parle dans sa description diocésaine, sous ces deux noms : Monasterium Lono-Retense , et Monasterium Longo-Reti.

Ce monastère devint un prieuré, ou abbaye subalterne dépendante de l'abbaye de Saint-Hilaire-le-Grand de Poitiers: il suivit le sort de cette abbaye.

Les guerres des Sarrazins, la conduite de Charles Martel, qui donna le revenu des monastères à ceux qui l'avaient bien servi, occasionnèrent le changement de ces maisons, en maisons de chanoines séculiers. Tel fut le changement de l'abbaye de Saint-Martin de Tours, de Saint-Hilaire de Poitiers.

Le prieuré de Long-Ré devint aussi un chapitre séculier, sous le nom de Saint-Laurent et de Saint-Hilaire ; mais toujours uni intimement avec le chapitre de Saint-Hilaire de Poitiers, et continuant de célébrer ses fêtes particulières avec distinction. Il nous reste quelques titres qui ont échappé aux fureurs du calvinisme : ces titres servent à prouver que les anciens catalogues des évêques de Poitiers, où l'on trouve en tête, Nectarius et Liberius, ne sont rien moins que méprisables ; que les auteurs du Gallia Christiana ont eu tort de les abandonner.

Un martyrologe et un nécrologe, écrits en 1271, nous apprennent que les corps des saints Nectaires et Liberius reposaient à l'abbaye de Saint-Laurent-de-Long-Ré, et qu'on les mettait au nombre des saints évêques de la ville de Poitiers.

  Si l'on s'en rapporte à la charte imprimée, et jointe aux Annales de Bouchet de l'édition de 1643, cette donation est de Clovis 1er, mais la date de celle charte de 524, postérieure à la mort de Clovis 1er, et ses autres défauts la rendent trop suspecte pour s'y fier.

Voici les termes du martyrologe au 19 juillet :

Pictavis sanctorum ejusdem civitatis Nectarü atque Liberi , juxta fluvium Ligerim in abbatid sancti Laurentii quiescentiunt.

Un autre manuscrit de la même abbaye écrit en 1286, qui fut entre les mains de M. l'abbé le Boeuf, s'exprime ainsi dans le calendrier au 19 juillet :

Nectariï et Liberii , episcoporum , duplex : fête des saints Nectaire et Liberius, évêques de Poitiers, double.

Voilà la fête de nos deux saints évêques célébrée conjointement au treizième siècle dans l'abbaye de Long-Ré.

Dans le corps de l'ordinaire même, au mois de juillet, on indique les psaumes, le verset, la collecte qui doivent se dire aux vêpres du jour de la fête sanctorum Nectarii et Liberü, et l'office de matines, où la collecte Propitiare sert à faire voir qu'on possédait les corps de ces deux saints à Long-Ré. Si l'on pouvait recouvrer le légendaire de cette église, peut-être y découvrirait-on l'époque de la translation des corps de ces deux saints évêques de Poitiers à Long-Ré.

Un ancien missel noté, de cette même abbaye, conservé à la bibliothèque du roi, écrit entre le treize et le quatorzième siècle, contient la collecte Propitiare en entier; elle prouve que les corps des deux évêques Nectaire et Libère étaient dans l'église de Long-Ré. Cette collecte est ainsi conçue :

 Propitiare , quasumus , Domine , nobis famulis tuis per sanctorum tuorum , quorum reliquiæ in præsenti continentur ecclesia , merita gloriosæ , ut eorum pia intercessione ab omnibus semper protegamur adversis,

Il y a dans ce même missel trois litanies, le samedi saint : Dans les secondes litanies de ce jour, voici les noms des évêques, sancte Hylari, sancte Lupe, sancle Bricii, sancte Nectari , sancte Liberi, omnes sancti confessores.

Le calendrier de ce missel met au 19 juillet : Nectarii et Liberii , episcoporum, et confessorum , duplex. Credo. La récitation du symbole suppose que c'était une fête d'un rang distingué, ou que les châsses des saints évêques Nectaire et Liberius étaient exposées.

On doit tenir pour certain d'après un concours de preuves si unanimes, que jusqu'au temps des guerres des calvinistes, les châsses de saint Nectaire et de saint Liberius, évêques de Poitiers, prédécesseurs de Saint-Hilaire, étaient révérées dans l'église de Saint-Laurent de Long-Ré, que quoiqu'on ignore ce qu'elles sont devenues , il n'est pas moins vrai que ces deux évêques ont siégé à Poitiers; qu'ainsi on doit les rétablir chacun dans leur rang avant saint Hilaire.

(3)  Souvenons-nous que les premiers chrétiens, persécutés à Rome, se servaient du poisson comme signe de reconnaissance. Poisson, en grec « Ichthus ou Ichthys » abréviation de Jesus Christos Theu Yos Soter, fils de Dieu Sauveur

 

Poisson, en grec « Ichthus ou Ichthys » abréviation de Jesus Christos Theu Yos Soter, fils de Dieu Sauveur

L'Eglise primitive avait hérité du Judaïsme son aversion pour toute représentation d'êtres vivants. Elle la justifiait en accusant peintures et sculptures d'être les propagatrices de l'idolâtrie. Témoin Tertullien qui, deux cents ans après J.-C, reproche encore à Hermogène autant sa profession de peintre que sa conduite légère. On peut juger par- là du crédit que méritent les légendes catholiques faisant de saint Luc le peintre attitré de l'Eglise apostolique.

Quand ce scrupule excessif eut été vaincu, les grandes persécutions sévissaient déjà. Elles contraignirent les chrétiens persécutés à cacher dans les Catacombes leurs premières pictographies et même, au début, à dissimuler ce qui se rapportait à leur Sauveur sous des allégories et des symboles : signes alphabétiques (α  et ω ), dessins conventionnels (poisson, agneau), personnages mythologiques ou bibliques (Orphée, Jonas, etc.).

(4) Thibaudeau, Histoire du Poitou.

(5) Histoire de Maillezais, par M. C. Arnaud, p. 3.

(6) Histoire de l'Abbaye de Maillezais.

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