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PHystorique- Les Portes du Temps
29 juillet 2020

Le pont transbordeur dit "du Martrou" de Rochefort a retrouvé son aspect d'origine 120 ans après son inauguration.

Le pont transbordeur dit du Martrou de Rochefort a retrouvé son aspect d'origine 120 ans après son inauguration Embarquez avec l’ingénieur Ferdinand Arnodin pour un voyage dans

Le transbordeur de Rochefort –Échillais, dernier de sa catégorie en France, a cessé d’assurer ses traversées de la Charente fin 2015 pour permettre à l’entreprise Baudin-Châteauneuf de réhabiliter l’édifice de fond en comble. Il ne reste que huit ponts de ce type dans le monde, dont celui du Martrou, haut de 50 mètres et long de 150. Classé monument historique en 1976

Tous les ponts à  transbordeur construits par Ferdinand Arnodin sont préfabriqués dans l’usine de Châteauneuf pièce par pièce  puis transportés par train sur leur lieu d’édification où une petite équipe d’ouvriers assure le montage qui dure environ deux ans. Chaque pièce est amovible et remplaçable.

La nacelle du dernier pont transbordeur de France, le pont dit "du Martrou", qui enjambe la Charente entre Rochefort et Echillais en Charente-Maritime. Elle est suspendue au tablier par des câbles croisés et se déplace sur les deux rails du tablier, composé de 24 paires de galets, tirée au moyen d'un câble qui descend et s'enroule et se déroule sur un treuil à tambour fixé au sol dans la machinerie qui se trouve dans un local côté Rochefort.

Le pont transbordeur dit du Martrou de Rochefort a retrouvé son aspect d'origine 120 ans après son inauguration Embarquez avec l’ingénieur Ferdinand Arnodin pour un voyage dans (4)

(Le machiniste surveille la préssion)

 L'énergie du treuil est fournie par un moteur électrique (à l'origine, un moteur à vapeur, jusqu'en 1927).

 (l'ingénieur Ferdinand Arnodin dans la salle des machines du pont transbordeur de Rochefort)

 L’État, propriétaire de l’ouvrage, a engagé un budget de 22,5 millions d’euros pour que ce pont, inauguré le 29 juillet 1900 et immortalisé en 1966 par Jacques Demy dans son film "Les demoiselles de Rochefort", retrouve son état d’origine.

 

Le_Courrier_de_la_Rochelle_[

LES MINISTRES A ROCHEFORT ET A LA ROCHELLE

Ainsi que nous l’avions annoncé, les ministres, MM. Baudin et de Lanessan, accompagnés des chefs de cabinet, MM. Juttet et Faure, et du chef d’état-major général de la marine, l’amiral Bienaimé, sont arrivés à La Rochelle, dans la soirée de samedi. Ils couchèrent à la préfecture et partirent dimanche matin, à 8 h. 1/2, pour Rochefort.

M. Mougeot, sous-secrétaire d’Etat aux postes et télégraphes, dont on avait espéré la présence, fut empêché.

Le départ de La Rochelle a été fort peu sensationnel, les ministres voyagent sans apparat, et les brigades chargées souvent d’assurer l’enthousiasme sur leur passage sont demeurées à Paris.

A la gare, ornée de quelques drapeaux, nous trouvons M. d’Orbigny, maire ; M. Metzger, directeur des chemins de fer de l’Etat ; MM. Modelski et Mayer, ingénieurs.

Avec le cortège officiel arrivent, après les ministres, MM. les Conseillers de Préfecture ; Bourdon, chef de cabinet de M. le Préfet ; M. J.-M. Gros, rédacteur à la Lanterne, etc., etc.

A Rochefort

Le train spécial arrive à Rochefort à 9 h. 1/4. Sur le quai de la gare sont les autorités maritimes : les amiraux Godin et Marquis ; le sous-préfet, M. Ducret ; le maire de Rochefort, M. Braud ; les sous-préfets de Jonzac et de Marennes.

La Marseillaise accueille les ministres qui pénètrent dans une salle d’attente décorée de verdures et de bouquets.

Les courtoisies officielles échangées, très brèves avec les amiraux, encore plus avec les autorités civiles, les ministres se rendent à la Préfecture maritime.

La foule semble curieuse, mais sans enthousiasme et ce sera sans doute le caractère persistant de cette journée jusqu’au soir, où en vérité l’ardeur populaire se déchaîna.

La presse, aimablement reçue par le syndicat rochefortais, prit place sur un élégant mail-coach et fut conduite chez M. Henri Mériot, où l’attendait un lunch que présida avec une parfaite courtoisie, M. le docteur Thèze.

Notre aimable confrère nous met au courant des procédés un peu cavaliers de la municipalité rochefortaise, qui élimine certains journalistes du banquet et prescrit à d’autres qu’ils n’auront accès dans la salle qu’au moment des toats. M. Braud, le victorieux du 6 mai n’a décidément rien de commun avec un fameux empereur du nom d’Auguste, et l’on ne parlera jamais au bureau du Rochefortais de la clémence d’Ernest !

 

Les réceptions

C’est à la préfecture maritime que commence véritablement la fête.

 Et d’abord le ministre de la marine remet au lieutenant Amiel la Croix de la Légion d’honneur, pour faits d’armes à Madagascar. MM. Cartier et Descudé, commissaires de la marine, sont également décorés. On trouvera d’ailleurs plus loin le détail des rubans répandus avec générosité par les ministres en ballade.

La médaille militaire est remise à MM. Denis, maréchal des logis de gendarmerie maritime , Bigorne, premier maître mécanicien, Laurent, 2° maître de manoeuvre ; Hughes, chef guetteur instructeur ; Roché et Le Botlan, gardes consignes ; Michaud, surveillant des prisons maritimes et Galopin, adjudant d’infanterie de marine.

Vers 10 h. 1/4 les réceptions officielles commencent, le ministre de la marine reçoit au premier. M. Baudin au rez-de-chaussée, et les fonctionnaires défilent, passent et repassent, rapportant au retour les bonnes paroles ministérielles.

M. de Lanessan s’est particulièrement intéressé au sort des ouvriers de l’arsenal; il s’est inquiété de la situation de la maistrance.

Le ministre de la marine a également accueilli la pétition de la Chambre de commerce de Rochefort, protestant contre la nouvelle organisation de l’armée coloniale.

La cour de la Préfecture est emplie de marins, de militaires et d’hommes politiques. Reconnus : MM. Garnier, Denis, Pommeray, Lauraine et Roy de Loulay, députés; Combes, sénateur; Rouvier, Rodde, Guillaud, etc., conseillers généraux...

A 11 h. 1/4, le défilé est fini, les personnages politiques et les hauts fonctionnaires vont dîner en petit comité à l’hôtel de l’Ouest.

 

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AU TRANSBORDEUR

A 3 heures, le cortège arrive au transbordeur de Martrou.

L’élégant ouvrage de fer est sobrement pavoisé, une sorte de pavillon est installé près de la rive, et c’est là que, debout, les personnages conviés à la solennité écoutent le magnifique discours de M. Combes, dont nous sommes heureux de rapporter ici les peints essentiels :

 

Discours de M.. Combes

Messieurs les Ministres,

Messieurs,

Rochefort est en fête ; il reçoit les ministres d’un gouvernement qui a toutes ses sympathies ; il inaugure, en leur présence, un ouvrage d’art qui est en même temps un travail de première utilité.

M. Combes se félicite de la joie de Rochefort, au nom du département qu’il représente ; puis il entreprend le panégyrique de M. Braud...

Le président du Conseil général entre dans le détail des démarches que nécessita le grand ouvrage et expose les nécessités qui l’imposèrent. Il fait un heureux parallèle entre les deux ports de la côte charentaise.

La Pallice et Rochefort

Vous le savez, Messieurs, la Charente-Inférieure possède deux ports dont elle s’enorgueillit à juste titre, un port commercial et un port militaire La Pallice et Rochefort.

Le génie de l’homme a créé La Pallice et la situation en est si heureuse, si pleine de promesses que les Chambres ont consenti, presque sans effort, à lui consacrer un chiffre très respectable de millions. Il importe que l’Etat ne s’arrête pas dans cette voie.

C’est notre devoir à nous, représentants du département, d’obtenir à force d’instances au prix même d’autres sacrifices s’ils sont nécessaires, qu’une si belle création ne demeure pas improductive et qu’elle ait sa part légitime dans le développement des relations commerciales et dans les échanges de toute sorte qui se pratiquent entre la France et le Nouveau Monde.

Messieurs, à la différence de La Pallice, Rochefort doit ce qu’il est à la nature, Colbert voulût fonder un port sur nos côtes, un examen attentif démontra que des avantages de toute nature militaient en faveur de l’emplacement de Rochefort.

 Il fut donc décidé que Rochefort serait le grand port de l'Océan.

 

L’école des torpilles

Passant à une des revendications les plus légitimes de l’île d’Oléron, M. Combes parle de l’abandon de l’Ecole des torpilles de Boyardville :

Les bâtiments délaissés représentent une perte sèche que nous aurons le droit et même le devoir de reprocher au ministère responsable tant qu’il n’aura rien fait pour la réparer. Les moyens de réparation ne manquent pas au gouvernement, qu’il y mette seulement un peu de bonne volonté.

Nos tramways

L’orateur poursuit la défense des intérêts départementaux et demande en échange de certains sacrifices de justes compensations gouvernementales

Nous avons économisé au ministère de la marine une allocation annuelle de 24.000 fr. que nous avons prise à notre charge.

Ces 24.000 fr. formaient sa part contributive dans l’exploitation des bacs de Soubise et de Martrou ; c’était la rançon du péage pour les ouvriers et marins de votre port.

Quand nous avons établi la gratuité des bacs de Soubise et de Martrou, nous l’avons établie pour vous comme pour tout le monde. Pour te grand seigneur de la rue Royale qui a un budget de 300 millions, comme pour le plus pauvre cultivateur. Etait-ce de notre part faiblesse ou générosité ? Nos commettants ont pu dire que c’était faiblesse, vous, Monsieur le Ministre, vous penserez que c’était générosité pure et vous nous en serez reconnaissant.

Et dès lors, M. Combes s’autorise à parler au ministre de l’entreprise qui est un peu sienne, les tramways départementaux :

Il est une affaire capitale pour nos campagnes qui est pendante présentement devant ce ministère ; c’est la construction de notre réseau de tramways. Ce réseau fait partie d'une conception d’ensemble destinée à satisfaire les besoins essentiels du département, la gratuité des bacs, l'installation d'un transbordeur entraient comme éléments dans cette combinaison, l’oeuvre conçue sera réalisée dans sa totalité quand M. le Ministre des travaux publics aura donné son approbation au réseau de tramways.

Nous avons la conviction qu’il ne la refusera pas et cotte conviction nous l'avons puisée dans les assurances de bon vouloir et d’amitié qu’il nous a prodiguées. S'il restait quelque doute, votre intervention le dissiperait, vous nous la devez, Monsieur le Ministre de la marine pour nous dédommager de notre générosité ou nous consoler de notre faiblesse.

L’oeuvre des tramways intéresse directement les populations rurales. C’est pour elles une question capitale.

Dans la lutte presque désespérée qu’elles soutiennent depuis vingt ans contre le terrible fléau qui a dévasté leurs campagnes, elles envisagent avec raison les voies projetées de communication comme un élément indispensable d’amélioration et de relèvement.

Plus un pays soufre, plus il a besoin qu’on lui facilite les acquisitions et les échanges. On comprendrait mal notre oeuvre des tramways, si l’on prétendait la juger comme une oeuvre industrielle. Nous l’aurons voulue comme un simple moyen d'action, comme un outil à mettre dans les mains du cultivateur pour tirer de ses terres, ce qu’il ne pourrait en recueillir autrement.

Ainsi, tous les motifs se réunissent pour incliner le gouvernement à la bienveillance plus marquée envers des populations énergiques, vaillantes et économes, républicaines par caractère, par réflexion, qui répugnent aux agitations bruyantes et factices et qui demandent à vivre et travailler en paix sous un régime également protecteur de l’ordre et de la liberté.

 

Discours de l’ingénieur Arnodin

Après ce discours fort applaudi, M. Arnodin, l’éminent ingénieur, qui édifia le grand ouvrage de Martrou, prononce une brève allocution qu’il termine ainsi :

Vous pouvez, en toute assurance, Messieurs les Ministres, affirmer au gouvernement de la République que sur les bords de cette Charente, qu’Henri IV appelait avec un point d’ironie, le plus beau fossé de son royaume. On y trouve de bons français qui travaillent sans bruit et de leurs mieux à la grandeur et i la prospérité de la patrie.

 Le pont transbordeur dit du Martrou de Rochefort a retrouvé son aspect d'origine 120 ans après son inauguration Embarquez avec l’ingénieur Ferdinand Arnodin pour un voyage dans (2)

Réponse du ministre

M. Baudin a écouté presque impassible ces discours assez longs, il semblerait que la fatigue à raison de son courage patriotique, il n’en est rien. Après l’ingénieur Arnodin, le ministre commence d’une voix terne mais nette, un discours d’une jolie tenue, sur la sollicitude gouvernementale pour ces splendides travaux d’intérêt régional. Il exprime son dévouement et celui du cabinet aux vaillantes populations de la Charente-Inférieure.

Chaque fois que nous avons l’occasion, nous venons visiter les populations. Nous persuadés qu’elles comprennent et connaissent notre rôle. Nous avons à coeur d'assurer ce qui a été menacé par des adversaires trop audacieux, la sécurité et la stabilité des institutions républicaines.

Nous venons à vous, heureux de vous dire que vous pouvez être sûrs de nous pour toutes les oeuvres sociales, pour toutes celles destinées à soutenir les efforts des travailleurs qui s’unissent et se réconfortent les uns les autres. Un pays ne vit pas seulement d’agitation et de discorde. Il ne peut lutter avantageusement avec les nations concurrentes qu’en faisant reculer ceux qui, par des tentatives trop audacieuses, voudraient menacer la démocratie.

Sans prétention au grand effet oratoire, le discours de M. le Ministre des travaux publics était plein de tact et d’habileté. Il a été vivement applaudi.

 

Sur la Charente

Sur les deux rives de la Charente, ou l’on voit circuler les embarcations qui prennent part aux régates, la foule est immense ; ça et là des musiques se font entendre ; la gaîté éclate peu à peu et remplace la curiosité froide de la matinée.

Les invités montent ensuite dans la nacelle qui les conduit vers la rive gauche. Toutes les populations riveraines acclament les ministres.

M. Garnier, dans un discours plein d’aimable bonhomie, souhaite la bienvenue aux ministres et dit que les conseillers municipaux de l’arrondissement de Marennes ainsi que les populations de la Charente, profondément attachées à la République ont voulu honorer et saluer en en eux le gouvernement de défense républicaine.

Le ministre de la Marine répond en quelques mots.

La nacelle du transbordeur revient sur la rive droite.

Les ministres s’embarquent sur les torpilleurs 182 et 187 pour visiter Boyardville.

 

A la Bourse du travail

Les torpilleurs portant les autorités sont arrivés au port neuf à 6 h. 45.

Les ministres se sont rendus immédiatement à la Bourse du travail, au milieu d’une foule considérable qui a manifesté sa sympathie sur leur passage.

M. Braud, maire de Rochefort, a prononcé un discours dans lequel il a fait l’apologie de la solidarité et l’historique de la Bourse du travail.

M. Veillet, président des syndicats, a prononcé une allocution.

Après avoir fait l’éloge des réformes démocratiques qui forment la tâche du gouvernement le ministre a dit :

« Ce matin, le ministre de la marine a inspecté le port de Rochefort avec le souci d’assurer la sécurité de la patrie. Le ministre salue au nom du gouvernement les travailleurs qui n’oublieront qu’ils doivent à la République l’émancipation et la réalisation des réformes sociales.

» Nous attendons trop de bienfaits de la République pour n’en être pas les premiers et respectueux serviteurs, et il faudrait bien mal vous connaître pour ressentir de l’appréhension de ces syndicats, dont nous devons, au contraire, attendre le plus grand bien, puisque c’est grâce à eux que les ouvriers doivent réaliser le progrès. »

Le ministre fait l’éloge des syndicats et des Bourses de travail qui sont, par la solidarité et la fraternité, le moyen pour les travailleurs, de s’émanciper.

Ce discours s’est terminé au milieu des acclamations.

Le syndicat sortit drapeau en tête et les assistants se répandirent en poussant les cris de Vive la République sociale ! et de Vive la République démocratique !

 A partir de ce moment, le peuple est monté jusqu’à l’enthousiasme et fort préparé pour les éloquentes harangues du banquet.

 

Au banquet

Dans l’immense salle du manège de. l’Ecole de dressage, on a installé des tables pour 700 couverts. Un vélum bigarré sert de toiture, les ministres occupent une table spéciale et nous voyons auprès deux les notabilités déjà citées moins M. Roy de Loulay plus M. Bisseuil. Signalons que M. l’amiral Rieunier ne parut pas malgré les faux bruits qui circulèrent le matin. Une société chorale, parfaitement dirigée fait entendre divers morceaux pendant le repas excellemment servi, bien qu’il fut fait par souscription très démocratique de 3 fr. 50.

 

Discours de M. le Préfet

L’éloquence officielle n’attend pas l’entremet, elle arrive de bonne heure, avec les haricots verts. C’est M. le Préfet de la Charente-Inférieure qui ouvre le feu. Nous avons dit que les auditeurs étaient bien préparés, ils le prouvèrent en faisant au discours de M. Fosse un succès des plus flatteurs. j

M. Fosse avait pris pour thème, l’éloge de M. Loubet le thème était heureusement choisi, il fut habilement développé, dans une langue forte, et dit d’une voix lente mais sonore. M. le Préfet a été parfaitement inspiré, et quand il termina en portant la santé du président, plusieurs convives unirent son nom à celui de M. Loubet dans leurs longues acclamassions. !

M. Braud, lut un discours assez terne,  et fort dépourvu de tout lyrisme. Il exposa de manière un peu monotone les revendications de Rochefort. Nous devons à la vérité de dire que l’émotion arrêtait un peu les paroles dans la gorge de ce brave maire :

« Ce banquet eut été le beau plus jour de sa vie peut être, si... mais il paraît que ce n’est qu’une formalité et que le ruban rouge oublié pour une fois, à Paris, arrivera par le prochain  courrier ministériel. »

 

M. Combes

Nous avons le devoir de dire ici hautement que cette journée fait le plus grand honneur à l’éminent homme politique qui préside le Conseil général de la Charente-Inférieure. Le discours de l’après-midi avait été l’exposé, magistral et habile, des revendications du département, le discours du soir fut une splendide profession de foi.

M. Combes fait tout d’abord l’éloge du maire de Rochefort, puis il entreprend l’éloge du gouvernement de défense républicaine.

Nous voudrions pouvoir citer en entier cette improvisation politique faite avec autant de netteté, dans les aperçus, que de correction dans la forme.

Ces mois « union et défense », dit l’orateur, sont la formule la plus complète du programme d'action qui s’impose aujourd'hui au parti républicain.

Les difficultés de l’heure présente sont venues de la division du grand parti républicain, qui a fait tout à la fois le jeu et la force de la réaction. Sa tactique s’est inspirée de ces circonstances à jamais fâcheuses et elle l’a admirablement exécutée, en supprimant ses propres candidats pour les remplacer par des candidats au masque républicain, libéraux, indépendants, mais qui faisaient parfaitement son affaire et lui préparaient les voies. i

Le résultat de cette tactique et des quelques succès qu’elle a valus à ses auteurs est que les élections ont été faussées, que la réaction a repris courage et qu’elle a poussé l’audace jusqu’à croire qu’il lui serait possible de toucher à nos libertés primordiales, aux lois qui sont la base de nos institutions démocratiques.

Mais elle a commis une grave imprudence en jetant trop tôt son cri de triomphe. Les républicains se sont aussitôt ressaisis ; les différents partis ont consenti les sacrifices mutuels nécessaires pour rendre possible une union reconnue indispensable, et ainsi l'on a pu reformer la phalange invincible de toutes les forces républicaines.

C’est de ce mouvement qu’est sorti le ministère Waldeck-Rousseau. 

L’ancien ministre, examine et dénonce la tactique des adversaires du régime républicain, il le fait avec des images heureuses et une grande beauté d’expression :

Du jour où le comte de Chambord est îles rendu dans les caveaux de Frohsdorff, enveloppé dans le drapeau de la légitimité, le cléricalisme a prétendu prendre sa place. Le bonapartisme, l'orléanisme sont des fantômes qui ne représentent rien de réel. Le danger est ailleurs. Le plus absolu des maitres et le plus fin, le pape a adopté facilement l’étiquette républicaine indifférente aux formes du gouvernement, pourvu qu’elle fasse la conquête du pouvoir, la réaction cléricale suit imperturbablement son chemin.

Elle donne le ton à l’armée, à la marine, à la magistrature, et n’est-ce pas elle qui inspire les ordres du jour de tel ou tel colonel rêvant ainsi de faire de la Fiance une nouvelle Espagne?

 

M. Gombes, dont le discours a été à chaque instant, interrompu par les ovations frénétiques de l’assistance, conclut :

Vous avez lait l’union, dit-il, aux ministres défendez maintenant la République, prenez l’offensive contre ses ennemis.

 L’orateur expose ensuite brièvement le grand programme des réformes démocratiques et il ajoute ;

Vous défendrez la société laïque contre les empiètements du monde clérical et les entreprises audacieuses du nationalisme.

M. Combes a protesté devant les ministres, du dévouement républicain de la Charente-Inférieure et de l’heureuse solidarité de ses représentants, puis il les adjure de faire leur devoir jusqu’au bout « sans intimidation ni-découragement ».

La grande rumeur de sympathie que soulève le discours de M. Combes dure encore quand M. de Lanessan se lève.

 

M. de Lanessan

Le ministre de la marine que pressait l’heure du train spécial que les besoins du service forçaient de ne pas retarder au- delà de 10 heures fit un discours fort bref.  

M. de Lanessan, au nom de ses collègues et du gouvernement de la République remercie la population de Rochefort et les autorités qui ont reçu les ministres.

Parmi les pensées pleines d’amertume, dit-il, qui m’ont assailli depuis que je suis au pouvoir, il ne s’est jamais glissé un seul souci sur l’avenir de la République.

Le gouvernement saura mettre les démocrates à l’abri des pires attentats de leurs ennemis. Nous saurons étudier dans le secret de nos conseils, le moyen de mettre nos libertés hors des atteintes de nos ennemis du dedans et nous mettrons le pays en état de tenir tête à nos  ennemis du dehors.

 

Un incident

Au moment où le ministre remercie, de son concours, le Sénat « si honorablement représenté, dit-il, par M. Combes » quelqu’un crie :

— Pas par Bisseuil !

M. Bisseuil, qui est assis à la table d’honneur se lève à demi et demande le nom de l’interrupteur.

Ce léger incident n’a d’ailleurs causé d’émoi qu’à M. le sénateur nationaliste Bisseuil.

M. de Lanessan poursuivant son discours rassure les autorités de Rochefort sur les intentions bienveillantes du gouvernement :

 « Rochefort, dit-il, doit construire et abriter des croiseurs rapides et retrouver sa prospérité d’autrefois. »

Pour couper court à l’ovation prolongée après ces paroles qui ravissent les coeurs rochefortais, le ministre s’écrie :

« Séparons-nous au cri de : Vive la République ! »

 

A 10 heures, sur le cours Roy-Bry, où stationne une foule énorme, on tire un feu d’artifice dont la pièce finale représente le Transbordeur de Martrou.

Les ministres ont regagné la Rochelle par train spécial et y sont arrivés vers sept heures.

Journée bien remplie et où furent dites au travers de beaucoup de pathos, quelques bonnes paroles républicaines.

 

Le Courrier de la Rochelle : journal politique, littéraire et d'annonces, feuille spéciale du commerce et de l'agriculture

 

 

Le pont transbordeur en quelques chiffres

• construction du pont : mars 1898 - juillet 1900, inauguration le 29 juillet 1900 ;

• distance entre les deux rives : 150 mètres ;

• tablier : 175 mètres de longueur, 8 mètres de largeur, pour 350 tonnes ;

• hauteur du tablier au-dessus des plus hautes eaux : 50 mètres ;

• pylônes métalliques de 1900 : 66,25 mètres de hauteur, pour 135 tonnes par rive ;

• fondation des pylônes : 8 piles maçonnées (4 par rive) d’une profondeur de 19,2 m en

rive droite et 8,5 m en rive gauche ;

• efforts verticaux à vide au sommet des pylônes : 250 tonnes par tête ;

• poids de chaque massif d’ancrage de 1900 : 1800 tonnes en 1900, porté à 2060

tonnes en 1933 ;

• nacelle : dimensions 14 m X 11,5 m, surface 161 m 2 , poids à vide de la nacelle 30

tonnes ;

• poids maximum des piétons ou cycles admis après restauration de la nacelle : 12

tonnes (10 tonnes avant restauration) ;

• chariot : monté sur 24 galets porteurs, poids 12 tonnes ;

• salle des machines installée en rive droite (Rochefort) ;

• durée de la traversée : environ 4 minutes et 30 secondes ;

 

 

La restauration du pont en quelques chiffres :

• poids des câbles neufs : 120 tonnes ;

• longueur cumulée des câbles neufs : 7,2 km ;

• câblettes équipant des garde-corps : 6,5 km ;

• 300 tonnes de tablier neuf, plus de 20 000 rivets réalisés ;

• 320 tonnes d’échafaudages, par pylône, équipés d’ascenseur (lift) ;

• 24 485 kg de profilés métalliques de pylônes remplacés, 6 000 rivets posés ;

• 64 700 kg de pièces neuves galvanisées (traitement anti-corrosion) ;

• 160 ml de carottages réalisés dans les massifs d’ancrage (chambres des nouveaux

tirants d’ancrage des câbles de retenue) ;

• 121 journées d’intempéries, entre octobre 2016 et juillet 2019 ;

• surface de peinture totale : 15 000 m², complexe constitué de 3 couches

• augmentation du seuil d’alerte au vent (nécessitant l’évacuation des riverains) : de

90 km/h à 115 km/h après travaux.

• 40 personnes ont travaillés sur ce chantier ;

Ce mercredi 29 juillet, pour le premier jour d’ouverture du monument après quatre ans de travaux, le pont transbordeur de Rochefort a retrouvé son aspect d'origine 120 ans après son inauguration. Embarquez avec l’ingénieur Ferdinand Arnodin pour un voyage dans le temps.

 

Le pont transbordeur dit du Martrou de Rochefort a retrouvé son aspect d'origine 120 ans après son inauguration Embarquez avec l’ingénieur Ferdinand Arnodin pour un voyage dans (1)

 ==> Sur les pas des Demoiselles de Rochefort (Virtual Tour)

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