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PHystorique- Les Portes du Temps
4 août 2020

Le Matin : derniers télégrammes de la nuit - L’ancien pont suspendu de Tonnay Charente, œuvre de l’ingénieur Arnodin

Le Matin derniers télégrammes de la nuit - L’ancien pont suspendu de Tonnay Charente, œuvre de l’ingénieur Arnodin

Ce pont succède à un vieux pont médiéval franchissant la Charente, mentionné en 1242, mais plusieurs fois détruit et reconstruit

Le 21 aout 1883, à 7 heures du matin, alors que l’on procédait à des essais sur le vieux pont de Tonnay-Charente qui devait être acheté par l’Etat, celui-ci se rompit à grand fracas.

La reconstruction de l’ouvrage fut alors décidé et l’on se trouva, à l’époque, en présence de données contradictoires qu’il était assez difficile de concilier pour arriver à un résultat qui pût satisfaire tous les intérêts en cause.

D’un côté, la marine voulait conserver un passage sous le tablier pour ses navires. D’autre part, les besoins de la circulation augmentée encore par la gratuité du passage qui allait être instaurée, demandaient un tablier assez résistant pour laisser passer les plus lourdes charges et assez rigide pour ne pas être balancé par les ouragans redoutables à une aussi grande hauteur. Enfin, les nécessités budgétaires dont on parlait déjà à cette époque faisaient écarter les solutions trop dispendieuses dont l’exécution aurait d’ailleurs demandé de longues années.

 

Le_Matin_ _derniers_télégrammes_[

L’œuvre de l’ingénieur Arnodin Ferdinand Joseph

Le programme du projet qui fut alors étudié par les ingénieurs compétents avait été ainsi résumé : « Reconstruction sur les bases anciennes avec tous les progrès actuellement connus ; faire beaucoup plus solide sans appuyer un kilogramme de plus sus les maçonneries. »

Le programme fut exécuté par M. Arnodin, ingénieur constructeur spécialiste dans l’édification des ponts suspendus, sous la direction et le contrôle de l’administration des ponts et chaussées.

M. Arnodin employa des câbles amovibles et des haubans de rigidité en fils d’acier tordu qui constituaient l’originalité de son système. Il construisit l’élégant ouvrage dont la légèreté alliée à la solidité donna une solution du problème qui fut très appréciée.

Le nouvel ouvrage fut inauguré avec éclat le 18 mai 1885 au milieu d’un grand concours de population. Et il est curieux de noter dans les discours qui furent prononcés des appels à l’union, à la concorde pour surmonter les difficultés de l’heure, et des vœux formés « pour que notre département voie le retour prochain à la prospérité industrielle et agricole »…ce qui prouve qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil.

Cependant le pont suspendu de l’ingénieur Arnodin ne devait pas durer plus de 50 ans, tout au moins dans sa structure primitive, sans subir de profondes modifications. En effet, l’intensité chaque jour plus considérable de la circulation automobiles, le passage répété des camions lourdement chargés finirent par ébranler l’armature de l’ouvrage qui donna des signes de fatigue. Il fallut aviser et prendre des mesures d’importance.

Et, il y a près d’un an, le 5 novembre 1934, c’est-à-dire près de 50 ans après sa mise en service, le pont de Tonnay-Charente était de nouveau abandonné aux mains des ouvriers pour une réfection de grande envergure. Il s’agissait de changer complétement le tablier et les organes de suspension.

Le_Matin_ _derniers_télégrammes_[

La réfection

C’est ce travail qui va prendre fin dans deux ou trois semaines. Il aura été exécuté avec le plus grand soin et, ce qui constitue un vrai tour de force, sans arrêter la circulation sur route la Rochelle-Rochefort Saintes qui est une route dont le trafic est considérable.

Cette besogne remarquable fut exécutée dans le vide sur une longueur de 206 mètres (le pont de Tonnay-Charente y compris le viaduc d’accès à une longueur total de 635 mètres) de la façon suivante :

Tout d’abord on construisit à l’intérieur des grands pylônes provisoires qui servirent d’appui à un câble également provisoire. Le tablier fut ensuite suspendu à ce câble qui remplaça les cinq câbles déjà en place.

On put alors dire que le pont ne tenait plus qu’à un fil. Ce fut la période critique durant laquelle le service de surveillance redoubla de  précautions. En effet, les voitures ne passent actuellement sur le pont de Tonnay-Charente qu’une à une et à une vitesse de 6km. A l’heure. Quant aux autobus ils doivent débarquer leurs passagers qui effectuent la traversée à pied et non parfois sans une certaine appréhension.

Lorsque le tablier fut suspendu à cet unique câble, on démolit les anciens pylônes que l’on remplaça par des neufs. Puis l’on fit passer par le sommet de ces ouvrages, les nouveaux câbles en aciers spéciaux à grande résistance. Ce travail terminé, le vieux tablier qui assurait toujours le passage des véhicules fut suspendu au nouvel édifice.

Tonnay Charente Pont suspendu - Intérieur de l'enfilade du pont

Tonnay Charente Pont suspendu - Intérieur de l'enfilade du pont

 

Résistance doublée

On procède maintenant au remplacement de proche en proche des éléments de l’ancien tablier. C’est ce travail qui sera vraisemblablement terminé dans deux ou trois semaines.

Comme en 1883, il s’agissait de reconstruire sur les maçonneries anciennes, sans augmenter la charge. Mais alors que le tablier de 1884 ne pouvait porter que deux véhicules à essieu de 7 tonnes ce qui était déjà un progrès considérable pour l’époque, on prévoit maintenant le passage de deux camions de 15 tonnes.

C’est en somme un pont presque entièrement neuf qui aura remplacé l’ancien et qui aura été construit, répétons-le, sans que soit arrêtée la circulation des véhicules à 40 mètres au-dessus de la Charente.

Tonnay Charente Pont suspendu 1842

Les essais à pleine charge avant la mise en service

Des essais sérieux seront effectués à pleine charge avant la mise en service de l’ouvrage. Afin d’éviter une catastrophe (d’ailleurs tout à fait improbable en raison des précautions prises) et pour ne pas exposer des vies humaines, c’est à l’aide de rames de wagons qui seront tirées à distance que les expériences seront pratiquées. Celles-ci auront lieu sous la direction de M Roulin, ingénieur des T.P.E du service des ponts et chaussées, à Rochefort  qui, malgré les préoccupations d’un service déjà très chargé, a suivi avec la plus vigilante attention et la compétence la plus éclairée, l’exécution de ces travaux qui nécessitèrent de la part du personnel ouvrier qui travailla dans les conditions très dure et parfois périlleuses, une conscience professionnelle à laquelle il convient de rendre hommage.

Le pont aujourd'hui

 

Fermé à tout trafic depuis l'inauguration du pont de Saint-Clément et quelque peu délaissé en raison de sa fragilité, le pont suspendu a cependant été de nouveau partiellement ouvert vers 1975. Seule, la circulation des piétons, cyclistes et motocyclistes y était autorisée, à la satisfaction également des nombreux touristes et visiteurs venant chaque année toujours plus nombreux pour visiter la ville et profiter du panorama sur la vallée de la Charente.

 Le 14 novembre 1988, le pont et les deux anciens pavillons de péage situés à l'entrée Nord-Est du pont ont fait l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques1. Le pont est ainsi l'unique édifice relevant du patrimoine urbain de la ville reconnu au titre des monuments historiques.

 

Jusqu'en août 2004, il était possible de traverser le pont à pied ou à deux roues mais, à partir de cette date, toute circulation fut interdite pour permettre d'établir de nouveau des travaux de restauration par la réfection du tablier, des câbles et de la maçonnerie.

 

En 2005, le pont servit de cadre au film Trois jours en juin, qui raconte la défense de la Loire par l'armée française durant la débâcle de juin 1940.

 

En juin 2009, à la fin de ce chantier de rénovation, réalisé par la société Baudin-Châteauneuf, la reprise de la circulation piétonne et des deux roues a été de nouveau autorisée, sur une bande située au centre du tablier.

Le 13 juin 2009 a eu lieu l'inauguration officielle de la réouverture du pont6. Près de deux ans après cette réouverture, la détérioration du nouveau revêtement en panneaux de bois aggloméré a conduit le maire à prendre le 18 février 2011 un arrêté interdisant la circulation à partir du 14 mars. L'entreprise Baudin-Châteauneuf a alors repris les travaux sur le tablier pour remplacer les plaques d'aggloméré par un platelage en bois de robinier de 45 millimètres d'épaisseur et 2,50 m de large. La structure supérieure du tablier quant à elle est dorénavant protégée par des bacs acier assemblés longitudinalement sur toute sa largeur.

 

Les rénovations de 2009 dont la durée de vie était estimée à une quarantaine d'années commencent à montrer leurs limites dès les premières années puisqu'en 2015, les services techniques de la ville estiment que 424 pièces de robinier posées au sol sont endommagées.

 

Cet ouvrage d'art a dorénavant une véritable orientation touristique et constitue plus que jamais un emblème historique indissociable de la ville de Tonnay-Charente. Du haut de son tablier, la vue sur la ville et son port est exceptionnelle et sa présence dans le paysage urbain constitue à la fois un atout et un attrait indéniable.

 

 

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