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PHystorique- Les Portes du Temps
20 décembre 2021

Louis II de Bourbon Otage pour le roi Jehan à Londres après le traité de Brétigny (31 octobre 1360)

Louis II de Bourbon Otage pour le roi Jehan à Londres après le traité de Brétigny

Devenu duc à la mort de son père, tué à la bataille 1356 de Poitiers où le roi Jean le Bon fut fait prisonnier des Anglais, Louis II de Bourbon incarna, dans la France de Charles V et Charles VI, un modèle de prince territorial, étroitement lié à la couronne.

Descendant de Saint Louis en ligne masculine directe, frère de la future reine (le dauphin Charles ayant épousé Jeanne de Bourbon en 1350), Louis de Bourbon fut élevé dans la compagnie des enfants royaux.

Il en garda des liens si forts avec Charles V et ses frères, Louis, duc d’Anjou, Jean, duc de Berry, Philippe, duc de Bourgogne, qu’un chroniqueur du XVe siècle dira d’eux qu’ils étaient « cinq têtes royales en un chaperon et d’un seul vouloir ».

Otage à Londres après le traité de Brétigny, il ne regagne la France qu’à la fin de 1366.

 

Comment le duc Loys de Bourbon alla en hostaige, pour le roi Jehan, en Angleterre.

C'est l'histoire de très excellent puissant et très noble prince, le duc Loys de Bourbon, conte de Clermont, grant chamberier et pair de France, duquel je considère l'excellence et la noblesse, pour ce que selon la droite ligne de génération, ou degré de consanguinité, il est descendu par généalogie de très glorieux Saint Loys, jadis roi du temporel royaume de France, comme vous orrez.

Icelui seigneur roi Saint Loys ot de la roine sa femme plusieurs fils, dont l'un nommé Robert, fut conte de Clermont, lequel espousa la baronnesse de Bourbon et de Robert issit Loys premier duc en Bourbonnois.

Car Sainct Loys celle baronnie esleva en duchié (1), après son retour de Damiette.

Et prist à femme icelui Loys dame Marie de Hainault, seur au conte Guillaume. Desquels Loys et Marie descendit le duc Pierre, qui espousa la seur au roi de France nommé Philippe. Et de Pierre et Isabel, sa femme, fut fils Loys de Bourbon (2), le tiers duc, dont cestui livre est fait.

Lequel duc fut requis pour aller en Angleterre, après la prise du roi Jehan, qui fut prins devant Poictiers, en bataille, laquelle obtint le prince de Galles (3) contre lui, l'an mil III LVI.

 Si obéït le duc Loys de Bourbon, et y alla (4), et si firent maints autres princes de ce royaume de France, du sang royal, comme les ducs d'Anjou, de Berri, et autres, et montoit la plégerie du duc pour quoi il estoit en ostaige, la somme de cent mille frans d'or, et la roine d'Angleterre qui lors vivoit, femme du roi Edouard, de l'hostel de Hainault, estoit sa parente, à cause de la mère au duc, aussi estant du lignage de Hainault et, pour la vaillance et belle jeunesse que la roine remira au duc de Bourbon, son parent, qui estoit ung moult bel chevalier et gracieulx, et qui aimoit l'honneur sur toute rien regardant aussi les bonnes meurs dont il estoit plain, et le sien lignaige, et qu'il estoit ung chevalier fort amoureux premièrement envers Dieu, après envers toutes dames et damoiselles, plein de gracieuses paroles, et ne pouvoit estre en lieu ou il oïst dire mal de dames ne de damoiselles, et ce a usé tout son temps, comme à plain est escript en aucuns livres, qui sont fais de lui dont ses vertus furent tant agréables à la roine d'Angleterre, et aux dames du pays, et à tous autres chevaliers et escuyers de honneur, que le duc Loys alloit par tout le royaume, à son plaisir, et venoit souventes fois devers la roine, à la court, ou s'esbatoit aucunes fois au jeu des dés, ou la roine passoit temps voulentiers.

Et celle grâce d'aller et venir par toutes festes et esbanois, avoit le duc Loys par sa gracieuseté, joieuse parole, et bel vivre, ce que nul, tenant les hostaiges, n'avoit, et tant, que par le royaume d'Angleterre les dames et damoiselles, les chevaliers et escuyers l'appelloient le Roi de honneur et de léesse.

Et demoura le duc Loys de Bourbon en cellui hostaige, à ses propres cousts frais et despens, pour son souverain seigneur, l'espace de sept ans complis, montant la despense la somme de quarente mille frans passés, sans le principal, qui montoit cent mille frans d'or; lesquels cent mille frans ses pays de Bourbonnois et Beauvoisin payèrent comptant, avec toute sa despense car en ce temps-là le roi Charles de France, qui vivoit, fils du roi Jehan, qui mort estoit en Angleterre, avoit tant à faire en son royaume, tant pour les esmotions d'aucunes ses communes, appellés Jacques et Maillets, comme pour le roi de Navarre, et d'autres grandes compaignies qui lui estoient contraires, que le roi n'avoit peu aidier au duc, non obstant que le roi de France ot espousée sa seur aisnée à femme, et le roi Piètre d'Espaigne l'autre et l'autre de ses seurs ot par mariaige le conte Vert de Savoye, ung grant seigneur et vaillant.

 La quarte espousa le conte de Harcourt, la cinquiesme, le seigneur de Labreth, et la sixiesme fut priouresse de Poissy ; et ot la tante du duc Loys por mari le Roi de Behaigne.

 

II.

Comment le duc Loys de Bourbon repaira d'Angleterre en son duchié de Bourbonnois, et qu'il dit à ses chevaliers.

Le duc Loys de Bourbon; après la mort du roi Jehan, paya toute sa finance dont il estoit pleige, et eut plaine quictance du roi d'Angleterre.

Puis passa la mer, et s'en revint en France, et l'en amenna ung grant chevalier d'Angleterre, appellé messire Hue de Caverlay à Clermont en Beauvoisin, et là demoura le duc l'espace de deux mois, pour payer aucuns restas, qu'il devoit encores en Angleterre.

Et venirent Bichat de Nade (5) et Lorin de Pierrepont, qui tous temps avoient bien et deuement servi le duc Loys en Angleterre, et despuis en de grans fais; lesquels portèrent la finance que le duc devoit en Angleterre, et aussi l'argent pour s'en venir en Bourbonnois.

Et de Clermont partit le duc Loys, et s'en vint en son duchié de Bourbonnois à Souvigni, ou il arriva deux jours devant Noël, l'an de grâce mil IIIe LXIIj (6), et de son eage l'an XXVIIj.

Car il avoit grant dévocion à deux corps saints, Mayol et Odille (7), gisans illec honnourablement ou prioré, et y séjourna voulentiers, pour ce que c'estoit l'une des bonnes villes de son pays.

Et là venirent par devers lui ses chevaliers et escuyers, qui bien sceurent sa venue, au jour de la feste, moult lies et joyeulx du repairement de leur seigneur.

 

 

Et vint là messire Griffon de Montaigu (8), et messire Guy son frère, messire Guichart Daulphin, le sire de Chastelmorand (9), et le sire de La Palice, le sire de Chaseuil, messire Guillaume de Vichy sire de Busset, le sire de Chastel de Montaigne, messire Lordin de Saligny, messire Regnault de Baserne seigneur de Champroux, et maints autres chevaliers et escuyers du pays de Bourbonnois, et n'estoit point de bonne heure né qui n'y venoit.

 Et à la ville de Souvigni, le jour de Noël, l'en de main, et l'autre, fut menée la plus grant vie que l'en peust faire, et le quart jour des festes dit aux chevaliers le duc en riant, [qui fort estoit joyeulx et plaisant de la belle noblesse qu'il véoit à sa compaignie illec venus de si grant affection et vouloir, pompeusement, et en grant estat de richesse] (10) :

 « je ne vous vueil point mercier des biens que vous m'avez fais, car se maintenant je vous en mercioie, vous vous en vouldriez aller, et ce me seroit une des grans desplaisances que je peusse avoir, car despuis sept ans je ne fus aussi lie comme je me treuve entre vous, car je suis en la compaignie ouj je vueil vivre et morir.

Et vous prie à tous que vous vueillez estre en ma compaignie le jour de l'an, en ma ville de Molins (11), et là je vous vueil estrener de mon cueur et de ma bonne voulenté que je vueil avoir avec vous, et vueil aussi que vous m'estrenez de vostre bonne voulenté, et ce seront unes riches estrenes au plaisir de Dieu.

Car j'ai espérance de me gouverner par vous, et par vostre bon conseil, ès choses « qui toucheront mes pays et le bien de ce royaume, esquelles je me vueil employer à mon povoir, à vostre bonne aide, en vous priant, si acertes comme a plus puis, que vous me vueillez aidier à recouvrer le a temps que j'ai perdu, et bouter avant l'hostel dont a je suis sailli.

Car j'ai le cueur et le vouloir de non estre oiseux. Et de ceci je vous prie avec les autres biens que vous m'avez faits que vous me vueillez aidier, car je vueil vivre et mourir o vous, et je pense « que aussi faites vous avec moi.

Et pour le bon espoir que j'ai en vous, après Dieu, d'ores en avant je pourterai pour devise une seincture ou il aura escript ung joyeulx mot Espérance.  

A celle heure les belles paroles du duc finées, la baronie qui là estoit, chevaliers et escuyers, ploroient de joie en disant benoist soit Dieu car nous avons seigneur et maistre. »

 

 

 

 

La chronique du bon duc Loys de Bourbon / [par Jean d'Orronville dit Cabaret] ; publiée, pour la Société de l'Histoire de France, par A.-M. Chazaud,...

 

 

19 septembre 1356 Bataille Poitiers – Maupertuis, le roi de France Jean le Bon est fait prisonnier par le Prince Noir <==

Traité de Brétigny Conclu le 8 MAI 1360, Ratifié à Calais par Jean II et Edouard III le 24 Octobre 1360  <==.... ....==> L'ordre de chevalerie de l'Écu d'or fondé en 1369 par Louis II, duc de Bourbon, peu après son retour de captivité en Angleterre.

 


 

(1). Erreur le retour de saint Louis étant de 1254, le mariage de Robert de 1276, et l'érection du Bourbonnais en duché de décembre 1327.

(2) Né le 4 août 1337. Il était fils de Pierre Ier (1311-1356), duc de Bourbon, et d'Isabelle de Valois, fille de Charles de Valois. Sa sœur, Jeanne de Bourbon, épousa le futur roi Charles V dont il devint le beau-frère et, par la suite, un oncle du roi Charles VI.

(3) Prince Noir

(4) Le 31 octobre 1360.

(5). Philippe de Chauvigny ou de Chouvigny, dit Bichat, seigneur de Nades et de Saint-Geran de Vaux. (Arch. Nat., P. 456, c, 184; P. 459, c. 211, et P. 1374, c. 2383.)

(6). Cette date, que donnent les trois mss., est inexacte; pour la faire cadrer avec l'âge donné au duc Louis il faut lire M ccc lxv, cf. p. 1, note 1.

(7). Prieuré Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Souvigny, Mayeul et Odilon abbés de Cluny.

(8)    Bernard Aycelin de Montaigut, seigneur de Châteldon et de Montgilbert, dit le Griffon de Montaigut.

(9) Jean de Châteaumorand, seigneur de Châteaumorand, de Châtelus et de Poligny, né vers 1355 et mort le 30 novembre 1429, est un chevalier bourbonnais.

(10) Le passage entre crochets, qui manque dans les mss. C. et B., ainsi que dans l'imprimé, est restitué d'après le ms. A.

(11) Moulins, capitale du duché du duc Louis II de Bourbon (région Auvergne-Rhône-Alpes)

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