Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
PHystorique- Les Portes du Temps
21 novembre 2023

7 mai 1737 Les moines de Saint-Michel-en-l’Herm font l’acquisition de l’Aiguillon-sur-Mer

L'Aiguillon-sur-Mer naguère siège d’une baronnie, mouvant de la principauté de Talmont, avec haute, moyenne et basse justice, appartenait en 1737, à François de Mesgrigny, comte de Marans, et à sa sœur, la marquise d’Ambouville.

 

François Ier de Mesgrigny, comte de Marans et de Briel, de Chamesson, d'Echarson, de Misery, de Samois et d'Alainville, chevalier de Malte, non-profès, sixième fils de Jean VII et de Marie Bouguier, naquit le 10 septembre 1619.

Il fut d'abord reçu chevalier de Malte de minorité, le 7 juin 1631.

 Il se distingua dans les guerres maritimes de son époque et commanda un vaisseau de la flotte du duc de Brezé, au combat du 14 juin 1646, contre la flotte espagnole, sur les côtes de la Toscane.

Par suite d'un traité de de l'ordre de Malte avec la république de Venise, pour l'armement d'une escadre contre les Turcs, le chevalier de Mesgrigny obtint une commission, le 15 août 1646, pour armer le vaiseau le Saint-Etienne, du port de cinq cents tonneaux.

N'ayant pas fait profession dans l'ordre de Malte, il rentra en France et fut nommé chef d'escadre des armées navales et gouverneur, pour le roi Louis XIV, des tours de Toulon et de Balaguier, de 1646 à 1652.

Quelques années après, il se retira dans ses foyers, au château de Briel qu'il avait fait bâtir, et se maria à Renée de Bueil, dame de Marans, le 12 avril 1656.

De ce mariage naquirent six enfants : 1° François II de Mesgrigny, comte de Marans et de Briel, qui suit; — 2° Joseph de Mesgrigny, chevalier de Malte; — 3° Renée de Mesgrigny, morte prieure à Foicylès-Troyes; — 4° Françoise de Mesgrigny, prieure du même couvent, après la mort de sa soeur ; — 5° Simonne de Mesgrigny, qui succéda à sa soeur Françoise dans le même prieuré ; — 6° Marie-Louise de Mesgrigny, mariée à messire Louis-Joseph de Broussel, marquis d'Ambonville.

 

 

François II de Mesgrigny, comte de Marans et de Briel, seigneur de Bueil, naquit vers 1657.

Il fut capitaine au régiment du roi Louis XIV.

Marié à Charlotte de Blicy, il n'en eut qu'une fille, Charlotte de Mesgrigny, dame de Misery, d'Echarson, de Samois et d'Alainville, comtesse de Briel et de Marans, morte sans alliance.

En lui s'éteignit la branche des seigneurs de Marans.

 

 

ACQUISITION DE L'AIGUILLON-SUR-MER.

Cette terre convenant très bien aux moines, ils résolurent d’en faire l’acquisition : leurs démarches furent couronnées de succès.

 Le 7 mai 1737 de cette année, ils s’en rendaient acquéreurs moyennant 23,000 livres et 1,000 livres de pots de vin, 3,450 pour les amortissements, 550 pour le contrat et autres menus frais, 120 pour l’insinuation, 270 pour le centième denier et 1.000 pour les lots, ventes et indemnités.

 

L’affaire présenta pourtant quelques difficultés.

Comme on avait oublié de prévenir le prince de Talmont, et que d’ailleurs les Pères de la chapelle de Saint-Jean, lui intentaient un procès, ce seigneur ne voulut faire aucune remise.

Grâce aux bons offices du duc de Châtellerault, son fils, et à force de sollicitations, les moines obtinrent pourtant 1,400 livres et en outre, le rachat qui serait monté au moins à 900 livres, car le vendeur était mort avant l’exhibition du contrat.

 

Le 19 juillet 1738, un ouragan épouvantable sévit sur le littoral.

La mer démontée atteignait une hauteur jusqu’alors inconnue : les vagues déferlant avec fureur étaient projetées jusque sur l’ilôt de la Dive, et le berger de Ribandon, surpris sur les relais avec son troupeau, fut enlevé par la mer avec plus de 300 moutons.

Les brebis périrent dans toutes les cabanes et des naufrages nombreux portèrent partout la désolation.

 L’administration de Samuel Guillaume de Verthamon, appelé à l’évêché de Luçon en 1738, semblait commencer sous de funestes présages.

 Au mois de décembre 1740, les rivières devinrent si grosses, sans qu’il fut tombé beaucoup de pluie, qu’on ne parlait que de villes et de bourgs submergés.

Le Lay emporta le pont de Mareuil et ouvrit le bot Grolleau et le bot de la Garde.

Au même instant, l’eau se précipitant couvrit les paroisses de Saint-Michel-en-l’Herm, de Saint-Denis-du-Payré et de Grues.

Le bot Bourdin put résister, et l’inondation s’étendit jusqu’à Triaize et Luçon.

Les eaux séjournèrent longtemps, les blés en herbe furent noyés, et il n’y eut pas de récolte cette année- là dans toute cette partie du marais.

Les moines de Saint-Michel, n’étaient que depuis une quinzaine d’années possesseurs de la terre de l’Aiguillon, lorsque vers 1752, les habitants de ce village s’aperçurent avec effroi que les flots de la mer envahissaient insensiblement les terrains formant la pointe de l’Aiguillon. En l’espace de trente années, la mer submergea prairies, vignes, champs, marais salants, et en moins de six années, le village de l’ancien Aiguillon, qui se trouvait à trois quarts de lieue sud-est du nouveau, fut complètement envahi ainsi que la chapelle et le moulin banal ; en sorte qu’en 1782, il ne restait plus que le manoir seigneurial, aux murailles duquel les flots venaient battre à chaque marée.

Il en résulta que les seigneurs de l’Aiguillon se trouvèrent dans la nécessité de concéder des terrains aux malheureux habitants expulsés de leurs demeures dont l’agglomération constitua le nouveau village.

Si l’on jette en effet, les regards sur une ancienne carte du Bas-Poitou, on y remarquera que le village se trouve à l’ouest de la Dive, et à quatre kilomètres sud-est du village actuel.

Ces faits résultent d’un ensemble de dépositions faites devant Chauveau, sénéchal de la baronnie, le 23 mai 1782, par plusieurs habitants du bourg.

Nous donnons plus loin, à titre de curiosités documentaires, les principales de ces dépositions extraites des Recherches historiques sur la Vendée, par A. Bitlon, série H., Saint-Michel-en-l’Herm (11 e liasse).

 - On assista alors dans cette contrée à deux singuliers phénomènes géologiques consistant, à la fois, en un affaissement du sol de la pointe de l’Aiguillon, pendant qu’à côté s’accomplissait lentement, mais d’une façon continue, l’atterrissement de l’ancien golfe des Pictons, dont l’anse de l’Aiguillon, offre aujourd’hui les derniers vestiges.

 

23 mai 1782 DÉPOSITIONS DE PLUSIEURS HABITANTS DE L'AIGUILLON-SUR-MER, RELATANT LA SUBMERSION DE L’ANCIEN BOURG, DANS LA DEUXIÈME MOITIÉ DU XVIII e SIÈCLE.

Aujourd’hui vingt-troisième jour du mois de may mil sept cent quatre vingt-deux, neuf heures du matin, en la salle judiciaire de la baronnie de l’isle et cap de l’Aiguillon, et par devant nous, Philippe Chauveau, avocat en Parlement, sénéchal, juge civil, criminel et de police de la dite baronnie, ayant avec nous Me Marc Biaise Testaud, notre greffier ordinaire ;

A comparu révérend Dom Joseph-Antoine Marcou, cellérier et procureur de l’abbaye royale de Saint-Michel-en-l’Herm, au nom de sa communauté et s’en faisant fort, seigneurs barons de la d. isle et cap de l’Aiguillon, assisté de Me René Aubain, procureur fiscal de la d. baronnie, lequel, pour luy, a dit :

Que depuis plusieurs années la mer a submergé grande quantité de terrains de la d. isle et cap, et notamment le terrain, où la chapelle et les maisons des habitants étaient basties, ainsi que le terrain où le moulin à tan estait basty, distant des d. maisons au moins de quatre cents toises, et enfin jusqu’au terrain appelé vulgairement la pointe de l’Aiguillon ; de façon que la mer a pris plus d’une demi lieue de large de la d. terre de l’ Aiguillon, vis-à-vis l’ancien village, bourg ou hameau de l’ancien Aiguillon, à plus d’un quart de lieue de large, depuis la pointe de l’Aiguillon jusqu’aux terres de la paroisse de Grues, de sorte que les d. seigneurs requérants ont été obligés de concéder un autre terrain, aux d. habitants, sur la d. baronnie, pour y bâtir et y établir, qui s’appelle aujourd’hui, le Nouvel Aiguillon, que pour preuve de ce que dessus, le d. révérend Dom Marcou, au d. nom, requiert que nous ayons à ouïr et entendre les plus anciens habitants de la d. île et cap, et rédiger par écrit, leurs dires et déclarations pour servir et valoir, en temps et lieux, aux seigneurs de cette cour, ce qu’il appartiendra.

Et s’est le d. révérend Dom Marcou, retiré, après avoir signé ainsi que le d. procureur fiscal. Signé en la minute : Fr. Joseph- Antoine Marcou, cellérier et procureur; Aubain, procureur fiscal.

A aussy comparu, Etienne Viaud, ancien matelot, natif de l’isle et cap de l’ancien Aiguillon, et habitant du nouveau, lequel nous a dit être âgé d’environ 74 ans, et qu’il a connaissance que, depuis plus de trente ans, la mer a commencé à prendre beaucoup do terrains dépendant de la baronnie de la d. isle et cap de l’Aiguillon, et notamment dans la partie où était bastie l'ancien Aiguillon, où elle en a pris au vis-à-vis d’iceluy, du costé de la mer, plus d’une demi-lieue de large; et qu’elle s’avance tous les jours sur la d. terre de l’Aiguillon ; et que le long de la côte depuis la pointe de l’Aiguillon jusques aux terres de Grues, elle en a pris en largeur plus d’un quart de lieue, en des endroits, et dans des autres plus ou moins ; qu’il y avait anciennement au d. vieux Aiguillon, outre les maisons, des prés, vignes, terres labourables et marais salants ;

que le tout est aujourd’hui submergé, ainsi que le moulin banal du d. lieu, que les seigneurs de cette cour ont été obligés de faire rebastir auprès du nouvel Aiguillon, ainsi que la chapelle et le logement du chapellain ;

de sorte qu’il ne reste plus à l’ancien Aiguillon que la maison seigneuriale, qui ne tardera pas à être submergée, qui est tout ce qu’il a dit savoir...

Ont aussi comparu : Jean Brocheteau, âgé de 74 ans, matelot, demeurant au nouvel Aiguillon, et Pierre Rossignol, aussi matelot, âgé de 60 ans, demeurant au d. nouvel Aiguillon, lequel d. Brocheteau, a dit avoir commencé à demeurer à l’ancien Aiguillon, il y a 50 ans, et le dit Rossignol, 42 ans ; qu’ils y ont demeuré depuis successivement sans intervalle, jusqu’à l’établissement du nouvel Aiguillon et qu’ils sont les deux, natifs de Triaize...

A aussi comparu, Pierre Poiraud, capitaine de la Fillardière, natif de l’ancien Aiguillon, âgé de 58 ans, demeurant actuellement au nouveau, lequel a déclaré... que les seigneurs ont été obligés de faire bastir le moulin, ainsi que la chapelle et maison du chapelain, il y a environ 7 à 8 ans (1774), de sorte qu’il ne reste à l’ancien que la maison seigneuriale, que l'eau de la mer entoure aux marées et est sur le point d’être submergé ; qu’en six ans de temps, l’ancien Aiguillon a été totalement submergé ; que, les années précédentes, la mer avait fait beaucoup moins de dégâts...

Sur quoi nous avons donné au d. révérend Dom Marcou, cellérier et procureur de la d. abb. de Saint-Michel-en-l’Herm, et l’un des seigneurs de cette cour, assisté comme dessus, de ses comparutions, dires et réquisitions et ordonné qu’il sera délivré grosse des présentes en formes au d. révérend, Dom Marcou, pour être mise et déposée au trésor de la dite abbaye royale de Saint-Michel-en-l’Herm, pour valoir et servir aux d. seigneurs de cette cour, ce qu’il appartiendra en temps et lieu...

Donné et fait par nous dit Chauveau, le jour et an que dessus.

Signée Chauveau et Testaud.

 

==> L'abbaye de Saint Michel en l'Herm

==> Système de défense de la Baie de l'Aiguillon sur la commune de Charron

==> Etude historique - Les Ports francs au pont tournant Marans le Brault détruit par la tempête Xynthia.

Publicité
Commentaires
PHystorique- Les Portes du Temps
Publicité
Publicité